Jan 15 2011

La révolution de jasmin

Qui l’aurait cru ? Une révolution dans la joie, le rire, et les pleurs de bonheur ! Certes le couvre-feu est toujours de mise, mais avec une quasi-absence de violence. Bien sûr il aura fallu le sacrifice de Mohammed Bouazizi, bachelier contraint de vendre des légumes pour aider sa famille à survivre, qui s’était immolé le feu à Sidi Bouzid et avait agonisé 17 jours durant. Un sacrifice qui rappelait celui de Jan Palach, ce jeune tchèque qui avait fait le même sacrifice pour dénoncer l’invasion de son pays par les chars soviétiques en 1968, mais dont le martyre n’avait hélas rien changé au joug communiste qui s’abattait sur son pays.

En Tunisie, est-ce justement cette discrète fragrance de jasmin qui s’éveille à la nuit tombée, est-ce le tempérament tunisien, le niveau d’éducation de cette population jeune, la colère s’est manifestée avec spontanéité, mais sans la moindre peur, comme me le disaient les témoignages toujours rassurants et optimistes de mes amis là-bas, et en particulier de Madeleine Ben-Naceur, enseignante au Lycée de La Marsa et élue à l’AFE.

La Tunisie nous donne un magnifique exemple de maturité politique. Je n’ai jamais rencontré Ben Ali ou des membres de sa triste belle-famille mais j’avais eu l’occasion de rencontrer le Premier ministre Ghannouchi, qui m’avait favorablement impressionné par son sérieux et son application dans le développement économique du pays, et surtout nombre de femmes admirables, juristes, chefs d’entreprise, intellectuelles qui m’avaient beaucoup impressionnée par leur détermination dans une quête de justice sociale, de progrès et de laïcité. Je m’étais d’ailleurs servie de l’exemple tunisien en matière de réforme du code de la famille pour obtenir, par souci de protection de ces jeunes filles, que l’âge d e leur mariage passe, en France aussi, de 15 à 18 ans.

L’annonce hier du départ de Ben Ali, président de Tunisie depuis … 24 ans, semble annoncer une nouvelle ère de démocratie et de progrès. L’exemple de la Tunisie pourrait bien être suivi par d’autres pays du monde arabe, victimes eux aussi de la corruption d’une caste qui s’accroche avec acharnement au pouvoir comme seuls les dictateurs savent le faire. Espérons que ces autres peuples sauront apporter le changement avec autant de dignité que les Tunisiens, et surtout qu’ils sauront résister à ceux qui voudraient s’accaparer le pouvoir pour y introduire une autre forme de terreur et d’intolérance à l’exemple de ce qui a pu se faire en Iran ou en Afghanistan.