Juil 01 2013

Réforme de la représentation des Français de l’étranger : fin de la procédure législative

La majorité sénatoriale ayant voté conforme le texte adopté en deuxième lecture à l’Assemblée nationale, la loi réformant la représentation des Français de l’étranger a été définitivement adoptée (176 voix pour, 168 contre, 2 abstentions)… sauf bien sûr décision contraire du Conseil constitutionnel suite au recours que nous avons déposé avec les autres sénateurs UMP.

Les orateurs, toutes couleurs politiques confondues, ont quasi unanimement pointé les sérieuses lacunes de cette réforme, auxquelles il aurait pu être aisément remédié en laissant un peu de temps à la concertation. Même le rapporteur socialiste, Jean-Yves Leconte, a souligné que « sans recours à la procédure accélérée et dans une plus grande sérénité, nous aurions parfois pu travailler un peu mieux ».

Dans son intervention liminaire, la ministre déléguée Hélène Conway m’a directement attaquée en s’offusquant de ma demande de convocation d’états généraux de la citoyenneté à l’étranger, estimant que cette réforme suffira à mettre fin à l’abstention de masse. J’espère sincèrement que l’avenir lui donnera raison (même si je pourrais parier l’inverse) car c’est sa responsabilité personnelle qui me semble désormais engagée sur ce sujet. Je reste persuadée que cette réforme, totalement dénuée d’ambition, est condamnée à l’échec en matière de participation et constitue un recul démocratique notoire.

En lieu et place d’une discussion approfondie sur les moyens de stimuler la démocratie locale à l’étranger, le débat parlementaire s’est transformé en un marchandage de bas étage : en échange de deux bien maigres carottes – le maintien du nom « Assemblée des Français de l’étranger » et l’augmentation à 15 du nombre de circonscriptions AFE – le Sénat a voté conforme le texte de l’Assemblée nationale, entérinant :

  • la création de 444 conseillers consulaires dépourvus de prérogatives et de moyens
  • l’élection au scrutin indirect d’une AFE réduite à un rôle de figuration, dont les membres n’auront aucune compétence régionale
  • la suppression du vote par correspondance  et la dématérialisation de la propagande électorale
  • la mise à l’écart des associations d’expatriés, celles-ci n’ayant désormais plus le droit de participer au financement des campagnes électorales à l’étranger (une interdiction qui pourrait demeurer à l’état de vœu pieu dans la mesure où elle n’est assortie d’aucune obligation de tenue d’un compte de campagne).

Quant au nécessaire élargissement du collège électoral sénatorial que nous étions nombreux à réclamer, il reste d’ordre symbolique et s’accompagne de la mise en place d’une procédure de vote « de la main à la main » totalement dérogatoire par rapport aux exigences de notre code électoral (cf la motion d’irrecevabilité que j’avais présentée défendue en première lecture).

J’ai pour ma part cosigné les amendements réclamant une élection de l’AFE au scrutin universel direct (qui n’ont pas été acceptés) et présenté, également en vain, deux amendements cosignés par André Ferrand : l’un visait à interdire le cumul des mandats de parlementaire et de conseiller consulaire et l’autre tentait d’empêcher la disparition du vote par correspondance. J’ai également demandé à ce que les anciens conseillers à l’AFE puissent être associés aux travaux des conseillers consulaires, à titre honoraire.

Je regrette particulièrement le manque de mobilisation de mes collègues sénateurs en faveur du maintien du vote par correspondance. Si des difficultés ou des irrégularités ont pu être constatées, il aurait été plus judicieux de tenter de les résoudre ou de les prévenir, plutôt que de tout miser sur le vote électronique, procédure de votation refusée par l’armée américaine et par la Cour constitutionnelle allemande en raison de ses risques, alors que le vote par correspondance est accepté, en cas d’éloignement physique, par quasiment tous les grands pays démocratiques. Le scandale PRISM aurait pu inciter à davantage de prudence en matière de dématérialisation des procédures démocratiques…

Si le Conseil constitutionnel n’invalide pas la loi, la balle sera dans le camp du gouvernement, qui a pris soin de maintenir dans le périmètre du pouvoir réglementaire la définition des contours des prérogatives des futurs nouveaux élus. J’ai donc renouvelé ma demande à Laurent Fabius d’une véritable concertation en amont de la publication des décrets d’application, sorte de dernière chance pour sauver sa réforme technocratique fort éloignée des  préoccupations des communautés françaises à l’étranger.

→ Lire mes interventions et explications de vote

→ Voir mes amendements sur le cumul des mandats et le vote par correspondance postale (et ma tribune sur la fracture numérique et la citoyenneté à l’étranger)

→ Voir le recours déposé au Conseil constitutionnel par les sénateurs UMP

→ Consulter le texte de la « petite loi »