En demandant à ce que sa chaîne LCI passe de la TNT payante à la TNT gratuite, le groupe TF1 a donné le coup d’envoi d’une vaste redistribution des fréquences de la télévision numérique terrestre. Depuis quelques semaines, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) croule en effet sous les demandes des opérateurs. Tout comme LCI, Paris Première (chaîne payante du groupe M6) et Planète (groupe Canal+) demandent la gratuité. Cette dernière a déposé un dossier en ce sens auprès du CSA lundi dernier.
De son côté, Alain Weill, le patron de NextRadio TV , ne cache pas qu’il aimerait bien une fréquence nationale pour sa chaîne BFM Business, aujourd’hui diffusée sur la TNT, mais seulement en Ile-de-France. Parallèlement, il hurle depuis des mois contre le passage de LCI au gratuit, qui risque, explique-t-il, de fragiliser toutes les chaînes d’information– la sienne, en l’occurrence BFM TV, mais aussi i-Télé. Il annonce le dépôt cette semaine d’un recours auprès de l’Union européenne contre la loi audiovisuelle votée en novembre dernier, qui donne au CSA le pouvoir de décider, sous conditions, du transfert de chaînes de la TNT payante vers la TNT gratuite.
Mais ce n’est pas tout. Alain Weill estime par ailleurs qu’il y a de la place pour d’autres chaînes sur la TNT, citant les thématiques : histoire, voyages, art de vivre… M6 réclame à cor et à cri l’autorisation de pouvoir diffuser sur la TNT sa chaîne de téléachat. Quant au groupe NRJ, il vient de signifier au CSA qu’il rendait la fréquence TNT francilienne de sa chaîne NRJ Paris – qui va donc fermer –, mais il aimerait bien pouvoir lui substituer son autre chaîne, NRJ Hits, aujourd’hui uniquement sur le câble, le satellite et l’ADSL. Ce que le CSA lui refuse…
Chaînes publiques d’abord
Bref, les fréquences de la TNT font l’objet d’une véritable foire d’empoigne et il n’y aura pas de quoi satisfaire l’appétit de chacun. Une seule chaîne peut être assurée de voir sa demande satisfaite : France 24. Contrairement aux chaînes privées, les chaînes publiques bénéficient d’un « droit de passage » prioritaire. Il suffit donc que son actionnaire, l’Etat français, exerce à son profit son droit de préemption sur une fréquence pour qu’elle l’obtienne. C’est ce qu’il a décidé de faire, comme l’a indiqué il y a quelques jours la ministre de la Culture et de la Communication, Aurélie Filippetti, en réponse à une question écrite de la sénatrice UMP Joëlle Garriaud-Maylam : l’Etat souhaite préempter, en faveur de la chaîne d’information internationale, une fréquence TNT disponible en Ile-de-France.
Pour le reste, c’est un vrai casse-tête pour le CSA. Les demandes de transfert du payant au gratuit relèvent d’une décision simple du régulateur de l’audiovisuel. Pour diffuser de nouvelles chaînes, en revanche, il faut que le CSA lance un appel à candidatures. Mais, au préalable, la loi impose dans les deux cas de réaliser une étude d’impact, notamment économique, permettant de mesurer les éventuelles conséquences d’une telle opération pour le secteur. Si celle-ci conclut à un risque économique, le CSA est fondé à refuser les passages en clair. Il peut aussi décider de différer le lancement d’un éventuel appel à candidatures pour une période de deux ans, renouvelable une fois.
En tout état de cause, il paraît compliqué de refuser aux unes ce que l’on pourrait accorder aux autres… Difficile, par exemple, d’autoriser LCI à passer du payant au gratuit et de refuser le même droit à Paris Première ou à Planète. La tâche s’annonce donc très complexe. Et, à coup sûr, les acteurs n’hésiteront pas à déposer des recours auprès du Conseil d’Etat pour casser les décisions du CSA, s’ils n’obtiennent pas gain de cause.