Malgré l’avis défavorable du gouvernement et de la commission, le Sénat a voté en faveur de mon amendement visant à mettre fin au géoblocage sur l’achat de livres numériques. En effet, en l’état actuel du droit, la plupart des éditeurs refusent les achats passés depuis une adresse IP localisée à l’étranger ou ne permettent le paiement qu’avec une carte bancaire française.
Cela fait des années que je soulève le sujet, tant par le biais de question écrites (en 2012, 2013 et 2015), orales ou même d’amendements d’appel. Je suis donc particulièrement heureuse qu’une avancée puisse enfin être initiée au Sénat.
C’est un sujet d’une très grande importance, non seulement pour les Français de l’étranger mais aussi pour tous les Francophones et Francophiles du monde… et pour la francophonie. L’enjeu est culturel mais aussi commercial, puisque cette pratique du géoblocage freine nos ventes de livres numériques à l’international. Cette pratique pose aussi la question du respect du droit européen, la directive 123 CE de 2006 interdisant en son article 20 « les discriminations fondées sur la nationalité ou le lieu de résidence » au sein du marché intérieur européen ; de plus, un projet de règlement visant à assurer la portabilité transfrontalière des services de contenu en ligne dans le marche intérieur a été proposé par le Parlement européen et le Conseil le 9 décembre 2015. La pratique du géoblocage s’oppose, enfin, à l’évolution de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes en matière de propriété intellectuelle : en mai 2015 la Commission européenne a en effet annoncé sa volonté de créer un marché unique numérique.
Si les droits d’auteur sont réputés être exploités dans le pays de résidence, les juristes spécialisés sur ces questions estiment qu’il s’agit là d’une fiction juridique. Il est aisé de contourner le géoblocage par des proxy. Pourquoi donc contraindre au « piratage » ceux qui souhaitent accéder à nos livres numériques depuis l’étranger ?
Je me réjouis donc que mes collègues de tous bords se soient rangés à ces arguments tout particulièrement ceux qui ont cosigné mon amendement (notamment Robert del Picchia, Jacky Deromedi et Christianne Kammermann pour les Français de l’étranger)… mon seul regret étant qu’un autre de mes amendements, concernant l’accès par internet aux programmes français de nos télévisions, ait lui été jugé irrecevable par l’administration du Sénat l’article 40 du règlement du Sénat ayant été invoqué…
→ Lire mon argumentaire
→ Consulter mon amendement
→ Voir l’article de Nextinpact et celui de Numerama