Question écrite n° 18200 publiée dans le JO Sénat du 14/04/2011 – page 918
Mme Joëlle Garriaud-Maylam interroge M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative sur la stratégie de montée en puissance du programme Jules Verne qui, depuis 2009, permet à des enseignants titulaires des premier et second degrés d’effectuer un séjour professionnel d’une année à l’étranger.
Ce programme ambitieux et novateur s’inscrit pleinement dans l’objectif d’internationalisation du système éducatif français, en donnant aux enseignants l’occasion, en prenant part à la vie d’un établissement scolaire étranger, de développer des compétences qui leur permettront notamment de s’investir à leur retour dans leur académie d’origine, de mettre à profit les acquis de cette immersion et de participer à l’évolution et à l’indispensable ouverture européenne et internationale du système éducatif.
Ce programme contribue, de surcroît, à la politique éducative de la France à l’étranger, puisqu’il permet à des établissements locaux de bénéficier de professeurs français, que ce soit pour l’enseignement linguistique ou pour l’enseignement en français d’autres disciplines. Alors que l’enseignement d’excellence dispensé par le réseau de l’AEFE demeure inaccessible à de nombreux Français de l’étranger, du fait de son coût, de son éloignement géographique ou des capacités d’accueil limitées des établissements, la mise à disposition de professeurs français dans des établissements locaux constitue une initiative à développer pour permettre une montée en puissance peu onéreuse de l’enseignement en français et à la française. La mise à disposition d’enseignants français dans ces établissements étrangers contribue également à la diplomatie d’influence française en étant accessible aux étudiants francophiles étrangers.
Elle souhaiterait donc savoir si l’objectif global de trois cent cinquante participants fixé au niveau national a bien été atteint, si un premier bilan a pu être établi et si une montée en puissance du programme peut-être envisagée, en recourant éventuellement à des financements extérieurs au budget de l’État.
Elle aimerait également savoir si une nouvelle campagne d’information autour de ce programme pourrait être envisagée pour susciter un maximum de candidatures d’excellences et dans quelle mesure ce programme pourrait être étendu à des enseignants en retraite.
L’intérêt d’un tel programme pour la valorisation de la francophonie et le rayonnement culturel de la France, pour faciliter l’accès à une éducation à la française des jeunes Français de l’étranger et des étrangers francophiles, et pour internationaliser le système éducatif français justifierait sans nul doute une attention soutenue et, éventuellement, des investissements accrus.
Réponse de M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative publiée le : 15/09/2011, page 2393
Le programme de mobilité Jules Verne est en effet un programme ambitieux et novateur. Il convient de rappeler qu’il s’agit de permettre à des enseignants titulaires des premier et second degrés de partir vivre et enseigner hors de France afin de participer à la vie d’un établissement scolaire étranger et de s’y familiariser avec d’autres systèmes éducatifs, de parfaire leurs connaissances linguistiques et de contribuer au développement de la politique internationale de leur académie de rattachement, notamment par l’approfondissement ou la mise en place de projets et d’appariements entre établissements scolaires ou de partenariats entre académies et États ou collectivités territoriales étrangers.
Dans la circulaire parue le 14 mars 2011 au JO, il a été annoncé que ce programme serait reconduit pour la troisième année consécutive à la rentrée 2011.
Concernant les éléments de bilan, nous assistons à une montée en puissance de ce dispositif puisque lors de sa première édition 118 enseignants avaient été mis à disposition par le ministère de l’éducation nationale en 2009-2010, et que ce chiffre s’élevait à 161 pour l’année en cours, répartis entre 60 enseignants du premier degré et 101 enseignants du second degré, dont 22 professeurs de lycée professionnel. La quasi-totalité de nos académies se sont mobilisées : 27 académies sur 30 mettent en effet à disposition entre 1 et 15 enseignants. Les enseignants sont partis pour 21 pays d’accueil, au premier titre desquels apparaissent le Royaume-Uni (57), les États-Unis (25), l’Allemagne (21), l’Espagne (19) et l’Italie (14). Sur les 101 enseignants du secondaire, 30 sont des enseignants de langue vivante (anglais, espagnol, italien, allemand) et 19 sont des enseignants de lettres. 52 enseignants Jules Verne ont vocation à enseigner leur discipline – de l’histoire-géographie à la technologie, du génie électrique aux arts plastiques – dans la langue du pays d’accueil. Il est encore trop tôt pour annoncer un chiffre pour la prochaine campagne, car les délégations académiques aux relations européennes et internationales et de la coopération travaillent actuellement en concertation avec les services culturels de nos ambassades à la sélection des candidats au programme. Les partants ont été réunis lors d’une journée d’information le 6 juillet 2011 à Paris.
Cet effort du ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative pour contribuer à l’internationalisation de notre système éducatif intervient dans un contexte budgétaire contraint. Il a été d’emblée prévu de faire appel à des budgets extérieurs à ceux de l’État pour accompagner les enseignants dans leur engagement. En effet, les enseignants continuent à percevoir la rémunération ainsi que les indemnités liées à leur corps et à leur grade, à l’exclusion des indemnités liées à l’exercice des fonctions ou à l’accomplissement d’une responsabilité particulière (part modulable de l’ISOE, indemnité de sujétions spéciales Zep) ainsi que des indemnités pour heures supplémentaires (HSA, HSE) ou de la NBI. C’est pourquoi les autorités étrangères ont été sensibilisées au fait que les enseignants pourront percevoir une rémunération complémentaire ou recevoir une aide en nature du pays d’accueil. Cette disposition peut bien entendu, en fonction des situations locales et avec l’accord de nos partenaires étrangers, être étendue à des financements d’origine privée. C’est d’ailleurs déjà le cas pour plusieurs enseignants actuellement mis à disposition aux États-Unis, par exemple.
Au-delà de cette participation, il est essentiel de rappeler que le programme Jules Verne se comprend dans un esprit de réciprocité qui s’inscrit dans un mouvement général d’accroissement des échanges bilatéraux d’enseignants, en particulier dans l’Union européenne qui propose, par ailleurs, d’autres opportunités de mobilité au sein du programme « éducation et formation tout au long de la vie » (EFTLV). À cet égard, un nombre croissant de mises à disposition par les États étrangers de ressortissants exerçant des fonctions d’enseignement dans un établissement français pour une durée équivalente à celle du programme Jules Verne a été constaté en vue de la campagne 2011-2012. Il est essentiel d’entretenir cette dynamique.
En revanche, la participation des retraités à ce jour paraît difficilement envisageable étant donné que le ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative n’a pas autorité sur des personnels qui ne sont, par définition, plus titulaires d’un poste. Il convient sans doute de réfléchir, dans un autre cadre que celui de l’éducation nationale, aux possibilités d’organisation d’un programme de mobilité éducative qui ferait appel à la société civile.