Déc 13 2004

Projet de loi de finances pour 2005

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen des budgets annexes de l’ordre de la Légion d’honneur et de l’ordre de la Libération est une occasion unique de rendre hommage à toutes ces femmes et tous ces hommes auxquels notre République a décerné sa reconnaissance, un hommage que je voudrais d’autant plus appuyé que c’est la dernière fois que nous débattons des budgets des deux ordres.

La loi organique relative aux lois de finances supprimant les budgets annexes des ordres de la Légion d’Honneur et de la Libération dès 2006, je tiens à renouveler l’assurance du soutien indéfectible des parlementaires pour leur oeuvre remarquable.

Je veux aussi exprimer mes remerciements au général Kelche, grand chancelier de la Légion d’honneur, et au général de Boissieu, chancelier de l’ordre de la Libération, pour leur action. Nous espérons sincèrement qu’ils pourront continuer leur magnifique oeuvre avec toute l’autonomie nécessaire, au sein du programme « soutien de la politique de la Justice et organismes rattachés » de la mission « Justice » où devraient être désormais concentrés leurs crédits. L’avenir dira si la solution juridique retenue est la bonne. Mais il faudra de la vigilance, monsieur le ministre, et une volonté certaine pour préserver leurs moyens dans une enveloppe qui regroupera à la fois des crédits de communication et de fonctionnement du garde des sceaux, des crédits de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, ou encore diverses dépenses de l’état-major.

Une mission qui me tient à coeur est celle de la reconnaissance de la nation envers ses citoyens les plus méritants. Je crois ainsi qu’à l’instar d’autres pays européens nous devrions encourager la soumission de demandes de décorations par la société civile, afin d’éviter le risque de monopolisation des décorations par une certaine élite, un groupe de privilégiés, si méritants soient-ils. Car l’honneur et le courage, le service à la patrie se prouvent aussi au long de vies ordinaires lorsque la générosité, l’abnégation de soi et l’amour du pays sont les valeurs essentielles qui conduisent l’action. Ce sont les actions des plus méritants, si humbles soient-ils, qui doivent avant tout être reconnues à leur juste valeur et servir ainsi d’exemple.

La subvention versée par votre ministère se monte à 16,8 millions d’euros, en augmentation de 2,2 % par rapport à 2004. Cependant, le nombre des nominations et promotions dans l’ordre de la Légion d’honneur et l’ordre national du Mérite décroît, volontairement pour ne pas dénaturer le mérite de ces distinctions. Cette année, 13 026 citoyens français, hommes et femmes, civils et militaires seront récipiendaires.

Mais je regrette, à l’instar de notre excellent rapporteur spécial, que le nombre de femmes récompensées, qui était passé de 7 % en 1985 à près de 30 % des bénéficiaires grâce à la volonté du Président de la République, s’amenuise depuis deux ans : 18 % par exemple lors de la promotion du 1er janvier 2004. Il n’est pas acceptable, monsieur le ministre, dans ce domaine comme dans d’autres, que les femmes soient moins bien traitées. Nous attendons que vous réagissiez fermement à ce déséquilibre.

Je souhaiterais, par ailleurs, monsieur le ministre, vous interroger sur l’opportunité du maintien des émoluments aux décorés à titre militaire de la Légion d’honneur et des médailles militaires. Pour mémoire, un chevalier reçoit, à ce titre, six euros par an : une somme ridiculement faible, mais qui correspond à une dépense annuelle, pour la grande chancellerie, de plus d’un million d’euros et génère d’autres frais importants de gestion administrative. Ne serait-il pas plus sage de décider que tout ou partie de cette somme pourrait être destiné à un fonds de solidarité, géré par la grande chancellerie ou par la société d’entraide des membres de la Légion d’honneur afin de venir en aide aux plus démunis ?

Je crois également en l’impérieuse nécessité de l’informatisation de la grande chancellerie. Il est, en effet, très regrettable que, faute de fichiers informatisés, il soit quasiment impossible d’établir des listes fiables des décorés de la Légion d’honneur, notamment à l’étranger. Les Archives nationales ont mis en place un remarquable fonds « Léonore » qui répertorie tous les médaillés militaires et légionnaires, mais uniquement ceux qui sont décédés avant 1954. Il semble indispensable de l’actualiser au plus vite !

En tant qu’élue des Français de l’étranger, je souhaite mettre l’accent tout particulièrement sur l’universalité de la Légion d’honneur, car elle a permis, par le truchement des ambassadeurs et du ministère des affaires étrangères, de récompenser enfin la « France du dehors » composée de nos ressortissants vivant à l’étranger et de nos amis francophiles et francophones.

Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, la Légion d’honneur et le Mérite national sont en effet attribués plus largement à ceux dont les activités participent au rayonnement économique, culturel, scientifique et humanitaire de la France. Je tiens ici à rendre hommage à l’engagement de nos ambassadeurs, sans lesquels nos compatriotes ne pourraient prétendre au bénéfice de ces distinctions honorifiques.

Parce qu’elle jouit d’un respect universel, la Légion d’honneur est un formidable outil pour notre diplomatie et pour le rayonnement de la France. Mais, s’agissant des bénéficiaires étrangers, je me demande si les hommes ne sont pas, là encore, nettement plus nombreux que les femmes. Peut-être avez-vous, monsieur le ministre, des indications à nous donner à ce sujet.

Avant de conclure, je ne manquerai pas de rendre un vibrant hommage à l’ordre de la Libération, dont la subvention s’élève à 685 400 euros, en hausse de 1,19 % par rapport à 2004, ce qui lui permettra d’apporter des secours aux compagnons et à leurs familles. C’est l’occasion de saluer nos 105 compagnons de la Libération, les Français libres et nos 4 800 médaillés de la Résistance. Leur souvenir sera perpétué, le moment venu, par le Conseil national des communes « Compagnon de la Libération », pérennisant l’ordre par la création d’un établissement public administratif.

Je ne vous surprendrai donc pas, monsieur le ministre, en votant les budgets des ordres de la Légion d’honneur et de la Libération pour 2005, dans l’espoir du maintien à l’avenir de ces deux ordres dans l’intérêt et pour le rayonnement de notre pays. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)