Des milices locales fidèles au président ivoirien, Laurent Gbagbo, ont attaqué lundi dernier une position des rebelles des Forces nouvelles, à 450 kilomètres au nord-ouest d’Abidjan, à proximité de la zone tampon contrôlée par les forces de maintien de la paix françaises et onusiennes, dites « forces impartiales ».
II semble que la situation soit aujourd’hui sous le contrôle de l’Opération des Nations unies en Côte d’Ivoire, l’ONUCI, mais les fidèles du président Laurent Gbagbo ont promis de lancer de nouvelles offensives contre les rebelles des Forces nouvelles.
Par ailleurs, une campagne de presse particulièrement virulente se déchaîne depuis quelques jours en Côte d’Ivoire, menaçant la France de guérillas urbaines et d’un deuxième Diên Biên Phu. Selon cette presse, les populations de la zone sous contrôle des Forces nouvelles voudraient se rebeller pour reconquérir leur liberté, et les forces de l’ONU et les troupes françaises entraveraient ce mouvement en intervenant pour protéger les rebelles.
Cette campagne s’inscrit dans la suite logique de la demande appuyée des autorités ivoiriennes, selon laquelle la France devait contraindre les rebelles à désarmer, alors même que notre action là-bas ne peut être déterminée qu’avec le Conseil de sécurité des Nations unies.
Autre point d’inquiétude, les jeunes patriotes ont commis un avocat pour étudier la plainte qu’ils entendent déposer contre la France et la force Licorne après les événements de novembre. L’objectif de cette action semble clair : il tient plus à son exploitation médiatique auprès de l’opinion publique africaine qu’à l’issue de la procédure juridictionnelle.
Revenant tout juste d’un déplacement de quarante-huit heures à Abidjan, j’ai été témoin de la pugnacité des entreprises françaises et du courage de nos ressortissants dans ce pays en dépit des brimades, des vexations et d’une certaine désespérance face, par exemple, aux horribles saccages de ces écoles françaises qui firent autrefois notre fierté comme celle des Ivoiriens.
Madame le ministre, quelle est votre analyse de la situation dans l’ouest de la Côte d’Ivoire ? Pouvez-vous nous faire connaître la position de la France dans ce nouveau contexte particulièrement difficile ?
Comptez-vous, par exemple, prendre des mesures pour aider les 7 500 Français restés – ou rentrés – en Côte d’Ivoire à y reconstruire leurs moyens d’existence et à assurer la scolarité de leurs enfants, ou bien, comme le voudrait une rumeur persistante, envisagez-vous de fermer nos représentations françaises sur place en organisant une deuxième vague de rapatriements ? (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée aux affaires européennes. Madame le sénateur, je salue à mon tour la maîtrise et le courage de nos compatriotes. Le souci de leur sécurité et de leur avenir demeure la première priorité du Gouvernement français.
En liaison étroite avec la médiation sud-africaine comme avec nos partenaires européens, nous entendons parvenir à une solution qui préserve la légitimité démocratique, l’intégrité du territoire national et la stabilité régionale.
L’incident très préoccupant que vous évoquez se situe sur la frontière libérienne, dans une zone fragile marquée par de nombreux combats interethniques. Il succède à l’arrestation par les rebelles la semaine dernière, en zone de confiance, au Nord, d’un véhicule armé.
Dans les deux cas, l’ONUCI et Licorne sont intervenues immédiatement pour rétablir le calme et elles interviendront chaque fois que nécessaire, dans un sens comme dans l’autre.
Cette situation traduit l’exaspération croissante face à une absence de progrès depuis maintenant plusieurs semaines.
Fin décembre, sous l’impulsion du président Mbeki, l’Assemblée avait adopté la révision de l’article 35, franchissant ainsi une étape importante mais non suffisante.
Aucun progrès, en revanche, n’a été effectué en matière de désarmement. Aujourd’hui, pour éviter l’enlisement ou l’embrasement, il devient impératif de procéder désormais, dans les meilleurs délais, au cantonnement et, par la suite, au désarmement des forces rebelles comme des milices.
Le rôle des Nations unies, dans ce domaine comme dans celui de la préparation des élections, est essentiel et ses moyens doivent être conformes aux missions qui sont les siennes.
C’est dans cet esprit que Michel Barnier s’est entretenu avant-hier à Londres avec Koffi Annan et Condoleeza Rice. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)