Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la loi de finances pour 2007 s’inscrit dans la continuité des précédentes, lesquelles étaient marquées par la volonté de maîtrise de la dépense publique, dans un contexte de croissance plus forte de notre économie.
Conformément aux recommandations de la Cour des comptes et du Parlement, les différentes missions ont été modifiées et recentrées sur trois programmes bien définis, qui témoignent de l’introduction de bonnes pratiques de gestion dans les comptes publics. Cette continuité dans la maîtrise de la dépense, voulue par le Gouvernement, est sans précédent.
C’est la raison de la très légère baisse globale des crédits en faveur des anciens combattants, lesquels s’élèvent à 3,48 milliards d’euros, contre 3,61 milliards d’euros en 2006. Ces crédits figurent tous au sein de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation ».
Si l’on y regarde de plus près, on s’aperçoit que ce budget est très satisfaisant puisqu’il consolide les droits du monde combattant.
Au total, et à périmètre constant, la dotation moyenne par pensionné augmente de 2,25 % par rapport à l’an dernier. Ainsi, de 2002 à 2007, celle-ci aura progressé de 10,2 %, témoignant de l’attention que le Gouvernement porte au monde combattant et au devoir de réparation.
Après la revalorisation de 2 points inscrite dans le budget 2006, le budget 2007 prévoit une nouvelle augmentation de 2 points de l’indice de référence de la retraite du combattant, qui passera ainsi de 35 à 37 points dès le 1er janvier 2007. Le montant annuel de la retraite du combattant sera ainsi porté de 461,65 euros à 488,03 euros.
Il convient de rappeler que l’indice de référence de la retraite du combattant n’avait pas évolué depuis 1978. Au total, et compte tenu de ces deux augmentations successives, cette prestation augmente ainsi de 12 % en six mois. Plus de 1,4 million de personnes sont concernées. Ce nombre augmente d’ailleurs chaque année en raison, d’une part, de l’arrivée à soixante-cinq ans d’une grande partie des appelés du dernier contingent à avoir participé à la guerre d’Algérie et, d’autre part, de l’octroi de la carte du combattant à ceux qui justifient de quatre mois de présence en Afrique du Nord.
L’engagement financier de l’État est à la hauteur de cet effort puisque 116 millions d’euros supplémentaires sont consacrés à la retraite du combattant, dont 41 millions d’euros pour prendre en charge les 2 points supplémentaires. Au total, ce sont 755 millions d’euros qui seront destinés à la retraite du combattant en 2007.
Il faut se féliciter, en outre, de l’adoption par l’Assemblée nationale d’un amendement de nos collègues députés de l’UMP visant à relever de 2,5 points le plafond majorable de la rente mutualiste, actuellement fixé à 122,5 points d’indice PMI. Le Gouvernement a donc fait un effort supplémentaire dans ce budget 2007 en acceptant de porter ce plafond à 125 points, et nous l’en remercions.
Par ailleurs, les crédits sociaux de l’ONAC poursuivent leur hausse, afin de répondre aux besoins des anciens combattants en difficulté et de leurs veuves.
En effet, pour la troisième année consécutive, le budget des anciens combattants prévoit une mesure de revalorisation des crédits sociaux de l’ONAC, qui se monte cette année à 500 000 euros. La dotation, qui a été augmentée de 28 % depuis 2002, atteindra ainsi le niveau de 13,6 millions d’euros. Le Gouvernement entend ainsi donner à l’ONAC les moyens de mener une politique sociale dynamique en direction des anciens combattants.
Il convient de rappeler que près de la moitié des aides – un peu moins de 16 900 – sont destinées aux veuves d’anciens combattants en situation financière difficile. L’action sociale de l’ONAC en leur faveur a consisté principalement à résoudre leurs difficultés financières immédiates ou à long terme, consécutives au décès de leur conjoint.
Sur ce sujet, nous attendons les conclusions prochaines du groupe de travail – et je salue le rôle qu’y ont joué nos collègues Jacques Baudot et Bernadette Dupont – sur la question de la mise en oeuvre d’une allocation différentielle en faveur des veuves d’anciens combattants, laquelle nous semble indispensable.
L’augmentation des crédits sociaux doit permettre en particulier de développer les services à la personne : les participations financières allouées à ce titre concerneront principalement les frais d’aide ménagère, de portage de repas et de télésurveillance.
Ce budget 2007 poursuit, par ailleurs, une politique continue de soutien aux établissements publics emblématiques du monde combattant que sont l’Office national des anciens combattants et l’Institution nationale des Invalides.
L’ONAC va ainsi achever la réalisation du contrat d’objectifs et de moyens 2003-2007, qui aura été intégralement appliqué. Il aura permis, en cinq ans, d’adapter la structure de ses effectifs à ses missions prioritaires de mémoire et de solidarité, tout en continuant à assumer pleinement les missions de reconnaissance et de réparation.
L’Institution nationale des Invalides abordera, en 2007, la dernière année d’application de son projet d’établissement. Il pourra ainsi poursuivre la politique d’amélioration des soins entreprise depuis plusieurs années, continuer le programme de modernisation de son organisation administrative et développer encore plus son expertise dans l’évaluation et la prise en charge du grand handicap.
S’agissant des mesures nouvelles qui seront mises en oeuvre en faveur du monde combattant, il faut noter en particulier une meilleure prise en charge de l’appareillage des mutilés de guerre. Il faudrait également dégager des crédits spécifiques pour les prothèses des invalides de guerre à l’étranger.
Enfin, ce budget revêt cette année une valeur toute particulière puisque la décristallisation des pensions est enfin menée à son terme, ce dont je vous remercie très vivement, monsieur le ministre.
En 2002, le Gouvernement a apporté une réponse, attendue depuis quarante ans, à la situation inéquitable dans laquelle avaient été placés les anciens combattants ressortissants des États antérieurement placés sous souveraineté française.
La loi de finances rectificative pour 2002 a réévalué les droits des anciens combattants concernés en s’appuyant sur le principe de parité de pouvoir d’achat de l’ONU. Cette méthode a permis de rétablir l’équité. Depuis lors, chaque ancien combattant concerné a perçu des prestations d’un montant lui assurant un pouvoir d’achat identique à celui de ses frères d’armes français.
Entrée en vigueur en 2003, cette mesure s’est traduite la première année par un coût budgétaire de 130 millions d’euros correspondant à la revalorisation au titre de l’année 2003, à laquelle s’ajoutait le versement de quatre années d’arriérés. Depuis 2004, chaque année, 30 millions d’euros ont été consacrés à la décristallisation.
Une nouvelle étape va être franchie en 2007 à la demande du Président de la République, qui a souhaité, le 14 juillet dernier, la poursuite et l’approfondissement de ce processus. Ainsi, le conseil des ministres du 27 septembre dernier a décidé de décristalliser totalement les prestations du feu : retraite du combattant et pensions militaires d’invalidité.
Cette mesure n’était pas inscrite dans le projet de budget initial des anciens combattants, et la représentante des Français établis hors de France que je suis ne peut qu’approuver très chaleureusement cette décision attendue depuis tant d’années et relayée inlassablement par les élus à l’Assemblée des Français de l’étranger et les associations d’anciens combattants français résidant hors de France réunis au sein de la Fédération nationale des anciens combattants résidant hors de France, la FACS.
La décristallisation totale a un très fort impact à l’étranger dans notre ancienne communauté. Il faut donc se réjouir très vivement de l’introduction de cette mesure supplémentaire dans le budget 2007. Un amendement du Gouvernement, modifiant l’article 68 de la loi de finances rectificative pour 2002, a donc été présenté lors de l’examen de ce budget à l’Assemblée nationale et adopté à l’unanimité.
Plus de 56 000 bénéficiaires de la retraite du combattant et environ 27 000 titulaires de la pension militaire d’invalidité vont voir les montants de leurs prestations alignés sur les montants français. Ils seront désormais égaux en valeur nominale avec tous les anciens combattants de l’armée française. Cette décision sera mise en oeuvre dès le 1er janvier 2007 et 110 millions par an y seront consacrés.
Comme l’a déclaré le Président de la République, ces combattants originaires du Maghreb, d’Afrique noire, de Madagascar et d’Asie « ont droit à notre respect et surtout à notre reconnaissance éternelle ». La décristallisation totale des droits liés à l’activité combattante en est une nouvelle manifestation, particulièrement significative.
Toutes ces énumérations démontrent que ce budget est très satisfaisant puisqu’il gomme, enfin, les inégalités qui existaient entre anciens combattants, qu’il réévalue la retraite du combattant et qu’il assure, une fois de plus, une augmentation des crédits sociaux de l’ONAC.
Je tiens également à vous féliciter, monsieur le ministre, de la réussite des « Premières rencontres internationales sur la mémoire partagée » dans l’enceinte de l’UNESCO, les 26 et 27 octobre 2006. C’est vous qui en aviez eu l’idée et ces deux journées ont eu une influence très positive pour le renom de la France. Plus de vingt pays étaient réunis autour du thème de la mémoire combattante, avec pour objectif de promouvoir une paix durable. Les intervenants étaient tous d’un excellent niveau. Monsieur le ministre, je souhaite que vous nous disiez quelles retombées on peut attendre de la signature de nouveaux accords dans le cadre de cette politique de mémoire partagée, qui est un facteur de rassemblement des générations au-delà des frontières.
En ce qui concerne la date du 5 décembre pour la cérémonie d’hommage aux morts pour la France pendant la guerre d’Algérie, les combats du Maroc et de Tunisie, il ne nous semble pas opportun de la modifier – cela a déjà été dit -, car il s’agit d’une date consensuelle au sein des associations d’anciens combattants d’Afrique du Nord.
Avant de conclure, et comme rien n’est jamais parfait, même dans un budget aussi satisfaisant que le vôtre, je souhaite, monsieur le ministre, formuler quelques préoccupations.
La première, qui m’a été signalée par notre collègue Christian Cambon, sénateur du Val-de-Marne, est relative à la situation des harkis qui ont servi comme supplétifs à la section administrative urbaine de la force de police auxiliaire, engagée comme unité de combat durant la guerre d’Algérie. Il ne demeure que très peu de survivants, mais aucun d’entre eux n’a pu bénéficier, malgré la modification du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre, de la carte de combattant dès lors qu’ils ont combattu le FLN sur le territoire français. Seuls les harkis ayant servi sur le territoire algérien ont obtenu cette reconnaissance. Or leurs compagnons sont inhumés au carré militaire de Thiais, sous l’épitaphe « Mort pour la France ».
Cette interprétation très restrictive n’est pas sans effet sur leurs ayants droit.
N’estimez-vous pas, monsieur le ministre, qu’un geste de reconnaissance devrait être fait envers cette catégorie de combattants tout aussi méritants que leurs compagnons d’Algérie ?
Par ailleurs, je voudrais insister sur l’entretien et la restauration des lieux de mémoire à l’étranger, monuments, nécropoles militaires, cimetières, dont les budgets ne sont pas toujours à la hauteur des besoins. Or, lorsque ces lieux sont dégradés, c’est l’image de la France qui est touchée, et nos compatriotes de l’étranger nous le font savoir. Dans la perspective du renforcement de notre rayonnement à l’étranger, les crédits inscrits au programme pour 2007 ne devraient-ils pas être abondés pour financer les projets les plus urgents et les plus significatifs à l’étranger ?
Je voudrais également vous interroger sur le Bleuet de France, magnifique initiative, mais insuffisamment connue à l’étranger, me semble-t-il, alors qu’elle pourrait représenter une source non négligeable de financement pour nos anciens combattants.
Enfin, l’indemnisation des incorporés de force d’Alsace-Moselle dans les organisations paramilitaires allemandes RAD et KHD ayant survécu n’est toujours pas réglée malgré nos différentes interventions. J’en avais moi-même prononcé une à ce sujet voilà deux ans à cette tribune. Il me semblerait vraiment judicieux d’adopter l’excellent amendement de notre collègue Esther Sittler visant à budgétiser la moitié des crédits nécessaires à cette indemnisation, afin de régler ce dossier en toute équité.
Vous remerciant des réponses que vous voudrez bien nous apporter, et compte tenu des mesures très positives pour le monde combattant que contient votre budget, l’ensemble de mes collègues du groupe UMP et moi-même voterons sans réserve les crédits dévolus à la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » pour 2007, car ils traduisent particulièrement bien l’ambition qui est la nôtre d’honorer le droit à réparation et le devoir de mémoire. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF.)