Les collectivités territoriales et leurs groupements ont démontré, depuis l’entrée en vigueur de l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, leur capacité à investir massivement, et de manière pertinente, dans l’aménagement numérique de leurs territoires. Elles ont ainsi fait la preuve de leur aptitude à établir et exploiter des réseaux d’initiative publique ouverts et neutres (ainsi l’impact important des réseaux d’initiative publique dans la progression du dégroupage en France au travers des raccordements fibre optique des répartiteurs, ARCEP, observatoire du dégroupage, 3ème trimestre 2007).
Plus de 100 réseaux de communications électroniques d’initiative publique ont été mis en oeuvre ou sont en projet.
Une nouvelle étape s’ouvre à présent pour les collectivités à travers la nécessité d’assurer un développement optimal du très haut débit grâce à un déploiement cohérent de la fibre optique jusqu’à l’abonné, sur l’ensemble du territoire.
Le développement du très haut débit est aujourd’hui au coeur des réflexions engagées en matière de développement des communications électroniques.
Dans son rapport public concernant la mise en conformité des conventions « câble », publié en juillet 2007, en application de la loi n° 2007-309 du 5 mars 2007 « télévision du futur », l’ARCEP a insisté sur le facteur essentiel pour le déploiement du très haut débit que représentent les réseaux câblés appartenant aux collectivités.
L’ARCEP a publié, le 28 novembre 2007, dans le cadre de son programme de travail sur le Très Haut Débit, les résultats de deux consultations portant sur la situation concurrentielle des fourreaux de communications électroniques et leur régulation éventuelle, d’une part, et sur la mutualisation de la partie terminale des réseaux de boucle locale de fibre optique, d’autre part. L’Autorité a souligné dans ses conclusions le rôle déterminant que les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent jouer dans le très haut débit, comme ils l’ont fait dans le haut débit. L’ARCEP appelle de ses voeux des dispositions législatives pour l’accès aux immeubles et l’obligation de la mutualisation de la partie terminale de la fibre.
Ainsi, le Gouvernement a, parallèlement à la mise en place d’un comité de pilotage du très haut débit réunissant tous les acteurs concernés, engagé une consultation publique relative aux mesures législatives destinées à favoriser le déploiement du très haut débit dans les immeubles d’habitation. Ces mesures ont pour objectif de faciliter l’équipement des logements neufs et existants en fibres.
Le MEDEF a récemment pris part à ces réflexions en appelant les pouvoirs publics, dans un rapport intitulé « Faire de la France un leader de l’économie numérique » publié le 18 janvier 2008, à définir des objectifs ambitieux en termes de population desservie et de couverture du territoire. Le rapport propose la mise en place d’une gouvernance forte, en recommandant la nomination d’une personnalité visible en charge du numérique et placée à la tête d’un Haut Commissariat rattaché au plus haut niveau de l’État, ainsi que la création d’un Haut Conseil des technologies de l’information neutre et non gouvernemental.
Le déploiement de la fibre optique à l’abonné constitue donc aujourd’hui, pour les collectivités territoriales, un des enjeux majeurs du développement de l’accès aux services de communications électroniques très haut débit dans la continuité de leur rôle d’aménageur numérique de leur territoire.
L’objectif est de favoriser la mutualisation des infrastructures dans le but d’éviter une multiplication des réseaux, notamment au sein d’un même immeuble, ainsi que la coordination des travaux par les collectivités.
La proposition de loi présentée à cette fin est composée de deux titres :
* Un premier titre consacré à la sécurisation des conventions conclues par les collectivités territoriales pour le déploiement de leurs réseaux dans le cadre de délégations de service public.
* Un deuxième titre visant au déploiement du service public local du très haut débit.
1 – La sécurisation des conventions
La loi doit, tout d’abord, conforter le droit de propriété des collectivités territoriales et de leurs groupements sur les réseaux de communications électroniques déployés à leur initiative, qu’il s’agisse des réseaux câblés ou des réseaux de télécommunications.
À cet effet, la disposition proposée inscrit dans la loi le principe constamment affirmé par la jurisprudence que les biens établis et acquis par le délégataire dans le cadre d’une convention de délégation de service public sont la propriété de l’autorité délégante.
Afin d’assurer le contrôle effectif de ces réseaux et l’absence de discussion sur la portée de la propriété des collectivités, les mesures suivantes sont proposées.
La mission de règlement des différends de l’ARCEP, prévue par l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales et par l’article L. 36-8 du code des postes et des communications électroniques, est étendue à l’ensemble des conventions d’établissement et d’exploitation de réseau de communications électroniques conclues par les collectivités territoriales et leurs groupements, y compris aux difficultés liées à la mise en conformité des conventions « câble ».
En outre, il convient d’encadrer les modalités de relance de la procédure d’attribution à l’issue des conventions de délégation de service public pour s’assurer d’une réelle mise en concurrence et garantir la continuité du service (délai minimum, mesures pour assurer la continuité du service à la suite de l’attribution de la délégation de service public à un nouvel exploitant ou la reprise en régie par la collectivité, par exemple : la mise à disposition du système d’information, …).
Enfin, il est essentiel pour les collectivités de mieux connaître les réseaux et services présents sur leur territoire, afin de gérer au mieux leur domaine public et de jouer pleinement leur rôle d’aménageur.
Aussi, il est proposé qu’un nouvel article du code des postes et communications électroniques pose le principe de l’information des collectivités territoriales et leurs groupements. Cette information aux collectivités est compatible avec les impératifs de sécurité des réseaux.
S’agissant des services de télévision locale, il est proposé que les frais de numérisation des services en cause soient à la charge du distributeur.
2 – Développement du service public local du très haut débit
Le rôle des collectivités territoriales et de leurs groupements dans le déploiement du très haut débit est affirmé : le service public local portant sur l’établissement et l’exploitation d’infrastructures et de réseaux de communications électroniques institué par l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales inclut le segment terminal.
Cette application du service public local est déclinée dans un article particulier sur la boucle locale.
En outre, à la suite des mesures législatives destinées à favoriser le déploiement du très haut débit dans les immeubles d’habitation proposées par le MINEFE, il est proposé de conférer un droit d’accès aux réseaux d’initiative public pour le déploiement des réseaux internes des immeubles et des lotissements dans le cadre de l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales. Les dispositions proposées ci-après visent à permettre de prendre en compte de manière spécifique la présence de réseaux d’initiative publique, celle-ci permettant d’accélérer la desserte des habitants et de réduire les nuisances pour les occupants.
Selon la jurisprudence de principe établie par le Conseil d’État, la spécificité des obligations de service public justifie un traitement distinctif pour tenir compte de l’intérêt général de la mission des collectivités territoriales. Le droit, qui leur est reconnu, est en effet compensé par les obligations du service public, auxquelles répondent les réseaux d’initiative publique.
En outre, les réseaux d’initiative publique sont, de par la loi, ouverts à l’ensemble des opérateurs de communications électroniques, dans des conditions transparentes, objectives et non discriminatoires. Ils ont pour objectif d’ouvrir le marché local du très haut débit à la concurrence.