Question écrite n° 17250 de Mme Joëlle Garriaud-Maylam (Français établis hors de France – UMP) publiée dans le JO Sénat du 17/02/2011
Mme Joëlle Garriaud-Maylam attire l’attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur l’intérêt de créer des commissions bilatérales de médiation parlementaire avec certains États particulièrement concernés par les conflits parentaux entre un Français et un ressortissant du pays d’accueil.
Elle rappelle que les conflits parentaux transnationaux concernant l’attribution et l’exercice de l’autorité parentale se sont très sensiblement accrus parallèlement à l’augmentation des unions mixtes. Ces litiges peuvent conduire à priver un enfant de tout lien avec le parent français, ainsi qu’avec la langue et la culture françaises. Dans certains cas, la situation dégénère au point d’entraîner des déplacements et rétentions illicites d’enfants.
Le droit international en vigueur ne permet pas actuellement de résoudre avec suffisamment d’efficacité ces conflits, même lorsque les États d’appartenance sont signataires de la Convention de La Haye. Les divergences dans les cadres législatifs, pratiques judiciaires et politiques familiales rendent l’application du droit international extrêmement complexe et souvent inéquitable. La dimension politique de ces affaires ne peut plus être ignorée.
La commission de médiation parlementaire franco-allemande créée en 1998 avait, jusqu’à sa disparition en 2005, effectué un travail très positif, tant de négociation sur plusieurs dossiers que de propositions pour l’amélioration des dispositifs institutionnels en France et en Allemagne. Il semblerait opportun, non seulement de la réinstaller, mais également d’envisager la création de commissions similaires avec d’autres pays particulièrement concernés par ces conflits parentaux transnationaux, tels que le Japon, la Russie ou les pays du Maghreb.
Réponse de M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, publiée dans le JO du 28/04/2011, page 1113
Le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, est particulièrement attentif à la prévention et à la lutte contre le phénomène des déplacements internationaux d’enfants, lesquels génèrent de très grandes souffrances pour les enfants, séparés brusquement de l’un de leurs parents, et aussi pour ces derniers. C’est pourquoi le ministère de la justice et des libertés agit, sans négliger aucune possibilité qui permettrait d’apporter une solution dans ces situations particulièrement douloureuses. Ainsi, le ministère de la justice et des libertés a-t-il soin d’encourager des États, tels la Russie et le Japon, à adhérer à la convention de La Haye de 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants, étant relevé que le Maroc est désormais partie à cet accord. Il faut, en effet, rappeler que même si cette convention n’a pas vocation à régler toutes les difficultés familiales transfrontières, elle n’en constitue pas moins une solution efficace – adoptée par quatre-vingt-quatre États – en ce qu’elle institue une action en retour à bref délai de l’enfant, tout en protégeant son intérêt et en préservant le droit de chaque parent. Dans ce cadre juridique, les États parties sont réunis régulièrement en commissions spéciales sous l’égide de la conférence de La Haye de droit international privé. De même, lorsque le besoin en est ressenti, sont réunies des commissions mixtes bilatérales, qui sont d’ailleurs parfois prévues par certaines conventions. Pour aller au-delà et sans attendre la ratification d’un accord international, le ministère de la justice et des libertés a entrepris de renforcer la coopération avec la Russie dans le cadre d’une structure bilatérale de concertation, de dialogue, de coordination et de consultation, qui, prochainement, permettra d’examiner les cas individuels. Pour parfaire ce cadre et le compléter, la France a obtenu de la Commission européenne l’autorisation de négocier avec la Russie un accord de coopération judiciaire en matière familiale. Par ailleurs, dans la mesure où il est indéniable que la réponse apportée au désarroi des familles ne peut être limitée à une dimension seulement juridique, le ministère de la justice et des libertés a mis en place, en son sein, un dispositif spécifique d’accompagnement par des intervenants sociaux ainsi qu’une aide à la médiation familiale internationale. Cette offre repose sur un double fondement international, d’une part, l’article 7 c) de ladite convention de La Haye, d’autre part, l’article 55 du règlement « Bruxelles II bis ». Le recours à l’aide à la médiation familiale est également possible dans les situations où il n’existe pas d’accord international en ce domaine. Certes, dans tous les cas, la mise en oeuvre de ce dispositif implique un accord des parties, mais il importe de retenir que cette aide peut être sollicitée par l’un des parents ou par des grands-parents, sans aucune condition de nationalité, et surtout, à n’importe quel moment : en amont d’une procédure judiciaire ou en parallèle à celle-ci, comme aussi bien en dehors de toute procédure judiciaire.