Avr 01 2012

Aung San Suu Kyi élue au Parlement birman !

Le 1er avril 2012 restera dans les mémoires comme une journée historique, celle où  Aung San Suu Kyi,  Prix Nobel de la Paix et qui symbolise depuis plus de vingt ans la résistance à la junte birmane, a enfin remporté hier son premier siège de députée. Par ailleurs, son parti la Ligue Nationale pour la Démocratie (LND) obtient 43 des 44 sièges  en jeu aux élections parlementaires partielles birmanes.

En tant que présidente déléguée du groupe d’amitié France-Asie du Sud-Est, présidente pour la Birmanie,  suivant le combat d’Aung San Suu Kyi depuis plus d’une vingtaine d’années, je m’en réjouis et la félicite chaleureusement . Sa  détermination et son courage à défendre la démocratie et la liberté de son peuple dans un contexte extrêmement rude et compliqué, au détriment de ses  propres intérêts personnels et de sa santé,  forcent l’admiration.

Cette élection et ces résultats – qui doivent encore être confirmés par la Commission électorale birmane – constituent certes un signal très positif sur l’ouverture politique affichée par le nouveau gouvernement militaire en place depuis quelques mois. Mais, pour bien connaitre ce pays, je reste prudente.

Il est d’abord trop tôt pour juger de la signification réelle des progrès affichés au cours des derniers mois.

De plus, même si le résultat exceptionnel du LND était confirmé, le nouveau gouvernement au pouvoir n’aurait de toute façon pas grand-chose à craindre, puisqu’il gardera la main jusqu’aux élections législatives de 2015. Le Parti de la solidarité et du développement de l’Union (USDP), créé de toutes pièces par l’ancienne junte, a obtenu   les trois quarts des sièges en 2010 et le dernier quart des postes parlementaires sont « en  vertu de la Constitution » attribués à des militaires d’active désignés en marge du processus électoral…

La « transition non violente placée sous contrôle de l’armée » évolue donc lentement sur une route qui reste encore longue et pleine d’embuches.

Aung San Suu Kyi le sait. A 66 ans, la lauréate du prix Nobel de la paix, attire des foules en délire, dont les regards trahissent un espoir immense. C’est pourquoi elle a appelé ses partisans à s’abstenir de tout débordement après ces élections partielles car, d’une part, elle veut que « la victoire du peuple soit une victoire digne » et d’autre part, parce qu’elle connait bien, trop bien,  ses adversaires politiques. Elle sait qu’ils n’hésiteraient pas à utiliser le moindre prétexte pour réprimer par la force cette petite avancée démocratique.

Un progrès minime qui doit toutefois permettre à Aung San Suu Kyi d’intégrer l’échiquier politique officiel et, espérons-le, d’influencer de l’intérieur le nouveau gouvernement, composés d’anciens militaires un peu plus réformateurs que la précédente équipe.

La communauté internationale ne doit pas non plus relâcher sa vigilance. Son rôle reste important, notamment quant à une décision de levée progressive des sanctions lorsque le niveau des réformes démocratiques le justifiera  et sera considéré comme irréversible.

Celle que les Birmans surnomment la « Dame » revient donc au premier plan politique. Il lui reste à  entraîner le pays vers une vraie transition démocratique.