Juin 21 2013

Etats-Unis (17-21 juin)

Vice-présidente de la commission sur la gouvernance démocratique de l’Assemblée parlementaire (Dimension civile de la sécurité) de l’OTAN, je ne pouvais me soustraire au déplacement sur la Côte Ouest des États-Unis organisé par ma Commission.

Seule sénatrice de la mission, j’ai rejoint une délégation de l’Assemblée nationale composée de Patricia Adam, présidente de la Commission Défense de l’AN, membre du PS, l’ancien ministre Pierre Lellouche (UMP), le député de Paris Jean-Marie Le Guen et le député du Nord Michel Lefait (tous deux PS). Les autres parlementaires venaient du Royaume-Uni (dont le Président de notre Commission Lord Jopling, du Portugal, de Croatie, Espagne, Turquie, Pologne, Grèce et des Pays-Bas.

Les thèmes retenus pour notre déplacement étaient variés mais toujours liés à la spécificité de notre commission :

  • L’importance stratégique croissante de l’Asie et ses conséquences pour l’OTAN
  • La lutte contre le terrorisme et les extrémismes
  • La sécurité territoriale
  • La sécurité biologique
  • La sécurité cybernétique
  • La gestion des frontières et la migration
  • L’évolution dans la région MOAN

La première journée de séminaire de l’Assemblée parlementaire OTAN se tenait à San Francisco Débats avec les experts civils et militaires des départements de sciences politiques de Berkeley et Stanford sur la situation en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, mais aussi sur les questions de trafics illicites d’êtres humains et de stupéfiants. Puis départ pour l’Ile d’Almeda, siège du commandement de la PACAREA (les Garde-côtes de la zone Pacifique) La PACAREA c’est 13 000 hommes et femmes, militaires, réservistes ou civils et une zone de compétence s’étendant de l’Arctique à l’Antarctique. Visite de leurs installations et bateaux bien sûr, mais aussi étude de leur implication, au-delà de leurs activités de sauvetage au quotidien (50 000 sollicitations par an !) dans la sécurité maritime et territoriale de la région.

Moment émouvant pour moi à l’Université de Stanford en y retrouvant l’ancien US Secretary of State George P. Shultz, 93 ans, une des personnalités les plus importantes de la vie politique, économique et universitaire américaine que j’avais rencontré il y a… 34 ans. J’étudiais alors à Yale et j’avais eu l’immense privilège d’être invitée à Washington DC pour y représenter mon université au séminaire d’une semaine intitulé « International Leadership Seminar » dont le but était de permettre chaque année à une poignée d’étudiants étrangers en Sciences Politiques d’échanger avec les principaux responsables de l’administration américaine, et ce jusqu’au plus haut niveau de l’État. J’avais alors été très admirative de ce brillantissime orateur, conseiller économique d’Eisenhower, ministre du travail puis des finances sous Nixon et avais suivi ensuite –mais de loin – son parcours qui fit de lui non seulement le US Secretary of State -donc en charge des affaires étrangères- de Reagan de 1982 à 1989 mais aussi un des négociateurs américains les plus efficaces sur la scène internationale, économiste et industriel réputé, président du Groupe Bechtel.

Quel plaisir de le retrouver à l’occasion de cette journée de débats passionnants sur les relations entre États-Unis, Chine et Russie, et de constater qu’à 93 ans, il n’avait absolument rien perdu de son intelligence acérée ni de ses capacités d’analyse et de stratégie. Mes collègues parlementaires de l’Assemblée de l’OTAN étaient tous subjugués…

Après Stanford, c’est dans la non-moins superbe université de San Diego que nous avons continué nos réunions de travail sur les orientations géopolitiques des Etats-Unis et leur positionnement stratégique croissant dans la zone Pacifique. L’université de San Diego est une institution catholique créée en 1952 comme collège de femmes, reconnue aujourd’hui comme un des meilleurs centres de recherche des États-Unis. D’inspiration architecturale renaissance hispanique elle s’étend sur un site magnifique surplombant le Pacifique, dans des jardins parsemés de jacarandas et de parterres d’agapanthes. Dans l’esprit des fondateurs «étudier dans un bel environnement ne peut que favoriser l’apprentissage » et je me suis dit qu’il faudrait vraiment que les responsables de nos universités françaises réfléchissent aux moyens de s’inspirer des bonnes pratiques américaines…

Nos débats avec les experts de défense et de politique internationale nous ont confirmé hélas que les États-Unis estimaient désormais que l’Europe devait se prendre en charge en matière de défense et que leur point d’ancrage, le « pivot » de leur politique étrangère était maintenant la relation avec l’Asie. Si nous ne pouvons que regretter cette baisse d’intérêt face à l’Europe, mais aussi face au Moyen-Orient, nous pouvons aussi comprendre leur exaspération de voir les faibles contributions de la plupart des pays de l’UE (hors Royaume-Uni et France) vers une vraie politique de défense européenne. Cette orientation était déjà sous-jacente il y a une quinzaine d’années, mais les événements du 11 septembre 2001 avaient stoppé cette évolution.

Le soir le Consul général de Los Angelès, Axel Cruau, nous avait fait l’amitié de nous rejoindre à San Diego où il avait organisé pour notre délégation française OTAN un dîner-rencontre avec les principaux acteurs de notre présence dans la ville (consul honoraire, directeur de la chambre de commerce, mais aussi d’autres Français passionnants, chefs ou responsables d’entreprise, industriels et créateurs innovants) Plusieurs voulaient nous interroger sur la politique intérieure française, pas très lisible hélas depuis les États-Unis, mais aussi de nous faire partager leurs expériences si positives, leur désir d’aider la France à aller de l’avant, à mieux se vendre sur ce marché en pleine expansion, mais aussi à se réformer…

La matinée du lendemain était consacrée à des débats sur les nouveaux défis en matière de sécurité civile et militaire, avec l’observation de situation concrètes et l’expérimentation de matériel de la SAIC, Société internationale d’applications scientifiques et leader mondial en matière de sécurité. L’après-midi fut lui consacré à une visite de l’impressionnante base navale de San Diego, principal port d’attache de la flotte du Pacifique, avec ses 50 navires de la Navy et plusieurs dizaines d’autres navires (garde-côtes, vaisseaux de recherche ou de soutien). avec un focus plus particulier sur le Partenariat transpacifique 2012 et le navire-hôpital USNS Mercy avec ses 1000 lits, utilisé pour l’assistance médicale d’urgence en soutien aux forces militaires mais aussi en cas de désastre humanitaire.

La matinée du lendemain fut consacrée aux questions d’immigration clandestine avec la visite des équipements des postes frontières entre les États-Unis et le Mexique. Puis, dans l’après-midi, ce fut le retour pour Paris…