Les listes électorales pour 2014 seront clôturées au 31 décembre, les élections consulaires auront lieu le 25 mai… mais nombre de Français de l’étranger – surtout ceux pas ou plus inscrits au registre consulaire – ignorent jusqu’à l’existence de cette nouvelle élection.
Votée dans la précipitation dans le seul but de changer en hâte, avant les sénatoriales de l’automne 2014, le collège de grands-électeurs chargés de désigner les sénateurs des Français de l’étranger, la réforme de la représentation des Français de l’étranger demeure une mystérieuse nébuleuse. A moins de 6 mois des élections, les décrets chargés de préciser les modalités de l’élection et le rôle et le fonctionnement des conseils consulaires n’ont toujours pas été publiés ! Une version provisoire avait pourtant été analysée par la commission des lois de l’AFE en septembre 2013. Depuis, plus rien. Le bureau de l’AFE n’a pu que constater le refus de l’administration de lui soumettre les textes, dont la publication est désormais annoncée pour janvier.
Il faut dire que ces décrets seront appelés à préciser une loi aux contours volontairement flous, et donc à dévoiler enfin les objectifs peu reluisants de la réforme. La réforme devait promouvoir la démocratie participative, mais les conseillers consulaires n’auront aucune prérogative nouvelle par rapport aux anciens conseillers de l’AFE, leurs moyens d’exercer leur mandat seront réduits, et la tutelle de l’administration consulaire sera maintenue – voire renforcée. La réforme devait accroître l’ancrage local des élus… mais l’administration, considérant que tout ce qui n’est pas explicitement interdit par la loi est autorisé, compte faire figurer dans les décrets d’application la possibilité pour un conseiller consulaire de se présenter à l’élection à l’AFE pour n’importe quelle circonscription dans le monde. A quoi bon, dans la loi, se fatiguer à négocier la délimitation géographique de 15 circonscriptions « régionales » si c’est pour autoriser des candidatures issues de n’importe quelle zone du monde ?! Autant voter une circonscription AFE unique…! Un conseiller consulaire d’Allemagne deviendra-t-il conseiller AFE pour l’Asie-Océanie ? Avec quelle légitimité et quels moyens ? Ne s’agit-il pas à travers ces décrets de fabriquer de toutes pièces une AFE dysfonctionnelle, afin de pouvoir dans les meilleurs délais la supprimer sans faire de vagues ?
Par ailleurs tous les ingrédients sont réunis pour aggraver encore l’abstention :
• Alors que les listes électorales pour 2014 seront closes au 31 décembre, de très nombreux Français de l’étranger n’ont pas été touchés par la fort modeste campagne de communication les appelant à vérifier leur situation électorale. Plutôt que de chercher des moyens de contacter ces derniers, l’administration consulaire prend le problème en sens inverse, et s’appuie sur un rapport de la Cour des Comptes pour réclamer l’interdiction de figurer sur les listes électorales lorsqu’on n’est pas inscrit au registre consulaire (plus de 60 000 électeurs seraient actuellement dans cette situation).
• Seuls 500 à 550 bureaux de vote seront ouverts à l’étranger (contre près de 800 en 2012), avec la difficulté de tenir à chaque fois 2 bureaux séparés puisque les élections consulaires sont organisées en même temps que les européennes.
• Le vote par correspondance postale a été supprimé, seul subsistant le vote Internet, autorisé uniquement pour les élections consulaires et non pour les élections européennes.
• Seules les personnes n’ayant laissé aucune adresse mail au consulat pourront recevoir par la poste des informations quant à la tenue des élections. Ces envois ne comporteront pas les professions de foi des candidats aux élections consulaires, désormais totalement dématérialisées (alors même qu’elles le seront pour les européennes qui auront lieu le même jour !)
Manque de communication, création de structures institutionnelles aux missions floues, absence de moyens alloués aux élus pour remplir leur mandat, aggravation des obstacles matériels à l’acte de vote… tous les ingrédients sont malheureusement réunis pour faire de 2014 une année d’abstention.
→ Lire la note de Christian Cointat sur les conseils consulaires, réalisée à partir d’une version non-officielle des décrets