Une nouvelle fois, mais pire encore que les autres années, le budget « Aide publique au développement» s’avère très insuffisant. Il soulève surtout de véritables questions quant au décalage entre les effets d’annonce et les décisions budgétaires.
En 2012, François Hollande s’était engagé à augmenter considérablement l’APD. Depuis, ce budget a baissé de 600 millions d’euros… Au mois de septembre dernier, le Président de la République annonçait à la tribune de l’ONU que la France allait consacrer 4 milliards d’euros supplémentaires à l’APD. Cette posture démagogique aura rapidement été démontée : les 4 milliards d’euros ne seront débloqués que sous forme de prêts et bonifications, et seulement « à partir de 2020 », soit après la fin du quinquennat ! Après moi, le déluge ? Dans l’immédiat, c’est au contraire une baisse de l’APD qui nous est proposée dans le projet de loi de finances pour 2016. Il est hélas devenu une habitude de constater notre incapacité à atteindre le seuil des 0,7 % du revenu national consacrés à l’APD, qui est pourtant un engagement international de la France. Mais la situation n’est pas stationnaire. Nous avons atteint l’an dernier le triste record de 0,36 % et venons de passer en dessous de la moyenne des pays du Comité d’aide au développement de l’OCDE.
Les crédits 2016 sont clairement sous-dimensionnés eu égard aux enjeux. L’afflux sans précédent de migrants commence à faire prendre conscience aux Français, ici et maintenant, des périls engendrés par la pauvreté, les catastrophes naturelles et l’instabilité politique dans les pays en voie de développement. Dans le contexte de la COP 21, on parle beaucoup de développement durable… mais n’oublions pas que la capacité des populations du Sud à vivre dignement est un facteur décisif pour la durabilité de nos choix de société. Les migrations et les extrémismes se nourrissent de la misère. C’est au moment où nous avons laissé les systèmes de santé et d’éducation africains se disloquer que des organisations islamistes ont ouvert des écoles et des centres de soins. Nous ne pouvons leur laisser ce rôle. Inversement, promouvoir l’éducation des jeunes et l’autonomie des femmes a des retombées positives infiniment plus nombreuses et plus vastes qu’on ne l’imagine généralement. L’APD n’est donc pas une question de bons sentiments, un vague supplément d’âme apporté à notre politique étrangère. Il s’agit bien au contraire de favoriser des équilibres géopolitiques et géostratégiques qui nous concernent directement.
Tel est le cœur du message que j’ai souhaité faire passer à l’occasion de l’examen des crédits alloués à la mission « Aide publique au développement » dans le budget de l’État pour l’année 2016. J’ai également dénoncé le jeu de bonneteau consistant à maquiller la baisse de crédits par un accroissement des recettes fiscales (taxe sur les billets d’avion et taxe sur les transactions financières) fléchées vers l’APD, et souligné l’importance de la lutte contre la corruption et la fraude fiscale.
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