En prolongement de mon déplacement en Arabie-Saoudite et en Inde, j’ai tenu à faire un « détour » par le Népal, petit pays enclavé dans l’Himalaya, plutôt oublié de notre diplomatie, bien qu’en position stratégique entre l’Inde et la Chine.
Je tiens cependant à saluer l’excellente qualité du travail de notre ambassade qui, malgré des moyens drastiquement réduits, a réussi sous la houlette de l’Ambassadrice Martine Bassereau à faire face aux conséquences dramatiques d’un séisme d’une ampleur exceptionnelle et à maintenir un certain rayonnement de notre pays.
De longue date classé parmi les pays les plus pauvres du monde, le Népal a vu sa situation s’aggraver considérablement après le violent séisme d’avril 2015 et, depuis septembre dernier, le blocus sur sa frontière avec l’Inde, suite au vote de sa première Constitution démocratique. Certaines minorités se considèrent en effet insuffisamment représentées d’où des tensions extrêmement vives ces derniers mois, qui seraient entretenues officieusement par le gouvernement indien. Le blocus a des conséquences humanitaires dramatiques pour les Népalais : en plein hiver, ils vivent de régulières coupures d’électricité, manquent de médicaments, de vaccin, d’essence,… La pénurie et l’augmentation des prix qui en résultent ne facilitent bien sûr par la reconstruction. De nombreuses familles victimes du séisme affrontent l’hiver himalayen sans perspective de pouvoir reconstruire leur maison à court terme.
Profitant de la visite d’État du Président Hollande en Inde, je l’ai appelé à intercéder auprès des autorités indiennes pour qu’elles prennent position en faveur de la fin du blocus. Il importe aussi que la France s’investisse davantage dans sa relation avec le Népal. Aucun moyen n’est alloué à la coopération universitaire, culturelle, économique ou technique. La toute récente transformation de l’ambassade en simple PPD (Poste de Présence diplomatique), accompagnée d’une drastique réduction d’effectifs, est une aberration, surtout à l’heure où nombre d’autres puissances, États-Unis en tête, renforcent, eux, leur positionnement dans cette zone stratégique. Heureusement, notre Ambassadrice Martine Bassereau déploie une énergie considérable pour pallier ce manque de moyens.
Au cours de mon séjour au Népal, j’ai notamment visité le centre des réfugiés Tibétains à Jawalakhel. Créé en 1960, avec l’aide de la Suisse et des Nations-Unies, le « Petit Tibet » abrite aujourd’hui encore 700 personnes, dans des conditions très difficiles, sans les papiers qui leur permettraient de travailler à l’extérieur, dans des bâtiments fissurés ou écroulés suite au séisme et sans chauffage du fait de la pénurie de fuel. Ces familles ont heureusement développé un savoir-faire remarquable en matière de création de tapis d’une qualité exceptionnelle, entièrement réalisés à la main, en laine de moutons tibétains avec des motifs traditionnels ou d’inspiration contemporaine.
J’ai également rencontré Sarah Blin, la responsable d’Handicap International sur place, qui m’a beaucoup éclairé sur les conditions de travail des ONG au Népal, les difficultés rencontrées, mais aussi les satisfactions de faire progresser les conditions de vie des plus pauvres. Autre rencontre passionnante, celle d’une Népalaise « survivante » de la traite – un fléau qui affecte particulièrement le Népal, avec environ 15 000 victimes par an, la plupart envoyées en Inde – qui a fondé la première association au monde de victimes désireuses de lutter contre ces ignobles trafics.
Autre rencontre davantage axée sur notre diplomatie d’influence, celle avec le Président de la Banque nationale d’investissement du Népal, Prithivi B.Pandé et sa femme Pratima, Présidente de l’Alliance française.
Enfin et surtout, j’ai consacré la majeure part de ma visite à la communauté française du Népal – 300 personnes seulement, mais du dynamisme à revendre, malgré des conditions de vie et de travail éprouvantes, surtout depuis le séisme et la chute du tourisme qui s’en est suivie.
J’ai ainsi tenu une permanence à l’Ambassade de France et rencontré Caroline Sengupta, Marina Shrestha et Chantal Berthome-Lama, les responsables de la très active société française de bienfaisance.
J’ai également visité l’école française de Katmandou, une ravissante petite école de 46 élèves, dont la pérennité est sérieusement menacée du fait des difficultés financières entraînées par le séisme. Suite à ce séisme, la directrice expatriée est partie, ce qui a entraîné des coûts considérables pour l’école. De même, plusieurs familles d’élèves ont également choisi de quitter le Népal.
De même, l’Alliance française a fait face à une diminution de ses effectifs après le séisme et se trouve de plus confrontée à l’obligation d’un déménagement. Alertée il y a quelques mois par notre conseiller consulaire Franck Barthélémy, j’ai d’ailleurs tenu à aider l’établissement avec ma réserve parlementaire. Parmi les projets innovants développés par sa directrice Véronique Brecchia, je salue notamment la mise en place de cours de français pour les guides en haute montagne népalais.
Dans ce pays où s’accumulent les difficultés, la fermeture du service consulaire de Katmandou, dont les fonctions sont transférées à New Delhi, à plus de 800 km, s’avère particulièrement pénalisante. D’autant que le consulat ne se contentait pas de gérer les 300 Français installés de manière permanente et d’accorder des visas aux Népalais souhaitant visiter la France : il était aussi compétent pour les quelques 30 000 touristes français venant chaque année visiter le patrimoine culturel népalais ou effectuer des treks dans l’Himalaya.
S’ajoute à cela le délabrement de la chancellerie suite au séisme. Des murs porteurs sont gravement fissurés, avec des risques importants pour le personnel de l’ambassade en cas de réplique. Il faudrait absolument la reconstruire, mais rien n’a été encore budgété pour cela…
Certes il faut faire des économies. Mais ne vaudrait-il pas mieux les faire lorsqu’il y a gabégie, en diminuant le train de vie de l’Etat et en supprimant par exemple des postes de chauffeurs dans les cabinets ministériels, plutôt qu’en fermant les ambassades qui demeurent un vecteur essentiel de rayonnement pour notre pays?