Mai 04 2016

La loi El Khomri, symbole de tous les renoncements

Tribune d’Olivier Dassault, député de l’Oise, que j’ai cosignée avec d’autres parlementaires, parue dans Les Echos du 4 mai 2016 :

L’immobilisme est en marche et rien ne l’arrêtera ! », disait Edgar Faure. Au regard des nombreux renoncements du gouvernement socialiste sur la loi El Khomri, cette citation de l’ancien ministre du général de Gaulle semble malheureusement devenir une bien triste réalité…

Plafonnement des indemnités prud’homales ? Le gouvernement y a renoncé ! La libéralisation du temps de travail des apprentis ? Aux oubliettes ! Quant à la souplesse du forfait jour, le gouvernement l’a tout simplement abandonné… Après le fiasco de la déchéance de nationalité, c’est donc la bérézina de la loi travail !

Sans oublier la surtaxation des CDD que vient de décider Manuel Valls, transi de peur face à une poignée de révoltés du collectif Nuit debout qui ne sont pourtant en rien représentatifs de la jeunesse française… Il n’y a décidément plus que nos socialistes pour penser qu’une telle mesure favorisera les embauches en CDI. Et dire qu’à l’origine, la loi El Khomri ambitionnait de réformer en profondeur un Code du travail volumineux et cadenassé qui constitue un redoutable frein à l’embauche !

Pourtant, il y a urgence ! Notre pays compte en effet plus de 6 millions de chômeurs et nos entreprises rechignent à embaucher à cause d’une législation étouffante qui les en dissuade. Quant à nos jeunes générations, elles restent aux portes d’un marché du travail surprotecteur pour les salariés en place, mais inaccessible pour ceux qui veulent y entrer ! C’est pourquoi, nos 2 millions de jeunes qui ne sont ni au collège, ni en formation, ni au travail ne sont pas place de la République, parmi les prétendus « indignés », mais pointent à Pôle emploi en attendant des actes forts pour libérer enfin le travail !

Alors, Monsieur le Premier ministre, écoutez davantage notre prix Nobel d’économie Jean Tirole, qui n’a cessé de dénoncer la rigidité « catastrophique » de notre marché du travail, plutôt que le président de l’Unef, qui n’a pas la moindre expérience en entreprise !

De même, Monsieur le Premier ministre, ne tremblez plus et osez mener les réformes courageuses mises en place chez nos voisins à l’étranger ! Créée à l’aube des années 1990 dans un contexte de crise économique, la « flexisécurité » danoise, qui combine souplesse des règles de licenciement et système d’aide au retour à l’emploi, a ainsi permis de diviser par 2 le chômage en vingt ans !

Les réformes menées depuis 2012 en Espagne, avec comme mesures phares, l’assouplissement des conditions de licenciement ou la possibilité pour les entreprises en difficulté de modifier l’organisation du temps de travail, ont également eu des résultats très positifs. La croissance espagnole a ainsi atteint 3,2 % en 2015, et le taux de chômage est tombé de 25 % à 20,5 % début 2016 avec la création de 525.000 emplois l’an dernier, du jamais-vu depuis 2006 !

Quant au « Jobs Act » du gouvernement italien de Matteo Renzi avec la mise en place d’un contrat à garanties croissantes en fonction de l’ancienneté en lieu et place du traditionnel CDI, il a permis la signature de 700.000 nouveaux contrats et la baisse du taux de chômage de 12,5 % en 2014 à 11,5 % en 2015 !

Sans oublier les lois Hartz du gouvernement de Gerhard Schröder (« minijobs », baisse des cotisations patronales, facilitation des licenciements pour les PME…) qui ont transformé « l’homme malade de l’Europe » en locomotive économique de notre continent, avec notamment un taux de chômage de moins de 5 % aujourd’hui contre 12 % au début des années 2000 !

« Oui, ca va mieux ! », comme l’a récemment affirmé le président de la République sur un plateau de télévision… Mais pour tous les pays qui ont, eux, osé des réformes courageuses génératrices de croissance et d’emplois !