Question écrite n° 24267 adressée à M. le ministre de la défense (publication au JO du Sénat du 08/12/2016) :
Mme Joëlle Garriaud-Maylam interroge M. le ministre de la défense sur les conditions de passation de son contrat-cadre avec Microsoft – dit « contrat open bar ».
Elle relève des apparentes contradictions entre la réponse publiée le 24 avril 2014 (p. 985) à sa question écrite n° 10694 du 27 février 2014 (p. 510) et certaines informations relayées par la presse, notamment par l’émission « cash investigation » du 18 octobre 2016.
Elle constate que l’un des arguments principaux au renouvellement de cet accord était la maîtrise des coûts. Or, il semblerait que ceux-ci soient passés de 80 millions d’euros environ pour la première période de contractualisation à près de 120 millions pour la seconde, soit une hausse de 50 %.
Elle souhaiterait savoir pourquoi, lors du premier accord « open bar », « le seul scénario qui était déconseillé a été celui qui in fine a été retenu » d’après les mots du directeur du groupe d’experts alors mandaté pour envisager différents scenarii.
Enfin, elle s’étonne que la réponse à sa question écrite précitée mentionne que « l’avis émis par la commission des marchés publics de l’État (CMPE) a été favorable » alors même que de fortes réserves et interrogations avaient été émises par le rapporteur pour la commission dans le document préparatoire à cet avis (CMPE n° 08-0179).
Elle souhaiterait donc que des précisions soient apportées sur les conditions de passation et les éléments ayant motivé le choix initial de recourir à cet accord dit « open bar » malgré ces avis contradictoires, et cela avant toute prise de décision quant à une éventuelle reconduction en 2017.
Réponse du Ministère de la défense publiée dans le JO Sénat du 26/01/2017 – page 295 :
Ainsi que le ministre l’a expliqué dans sa réponse du 24 avril 2014, le ministère de la défense a fait le choix de signer, en 2009, le premier accord-cadre, de gré à gré, avec la société Microsoft Irlande qui dispose de l’exclusivité de la distribution des licences Microsoft en Europe. Cette solution a permis de soutenir une partie du parc Microsoft déjà déployé au sein du ministère au moyen d’un support contractuel désormais unique (en substitution des 3 000 précédents), induisant d’importantes économies, ainsi que la mise en place d’une gestion centralisée, avec un nombre réduit de configurations. En 2013, ce contrat-cadre a été reconduit pour une période de quatre ans, avec une extension, à l’ensemble du ministère, de la démarche initiée en 2009 de maintien en condition des systèmes informatiques exploitant des produits Microsoft.
Le contrat conclu en 2013 concerne des prestations de services, dont la mise en place d’un centre de compétences Microsoft, et des locations de produits logiciels avec option d’achat permettant de générer de nouvelles économies, tout en conservant le principe de diversité des sources logicielles (autres éditeurs que Microsoft et logiciels libres), et donc la maîtrise de leur hétérogénéité. Il convient de préciser que les termes qui ont été parfois utilisés afin de qualifier le contrat global Microsoft et de suggérer un déséquilibre entre les obligations des deux parties ne reflètent aucunement la réalité du fonctionnement de cet accord-cadre. En effet, la « concession de droits d’usage » pour les produits considérés reste associée à des quantités plafond définies dans les marchés subséquents. Le ministère de la défense ne peut faire évoluer cette cartographie que dans les strictes limites d’un plafond financier initialement fixé. Dès lors, le ministère a mis en place une structure dédiée pour piloter le contrat. Cette structure est chargée d’assurer une gestion centralisée et continue de l’exécution du contrat en veillant notamment au respect de ses divers impératifs quantitatifs et financiers.
Les contrats signés en 2009 et en 2013 ne peuvent être directement comparés, car leurs périmètres ne sont pas équivalents. Le deuxième contrat a étendu la forme locative à pratiquement l’ensemble des licences du ministère, ce dernier s’étant en outre engagé dans une vaste transformation de ses systèmes d’information visant en particulier à se doter de services communs d’intranets. Le contrat de 2013 a ainsi permis de progresser significativement sur la voie du développement d’un socle technique ministériel commun. Cette orientation a eu pour effet de réduire le phénomène d’obsolescence et d’homogénéiser l’ensemble du parc du ministère, entraînant une efficacité accrue et faisant diminuer sensiblement le coût unitaire des produits.
Pour ce qui concerne le rapport du groupe d’experts évoqué par l’honorable parlementaire, celui-ci n’a constitué que l’un des pans des travaux et réflexions conduits par la direction des systèmes d’information et de communication, préalablement à la signature de l’accord de 2009, en matière de stratégie d’achats auprès de certains éditeurs en vue de rationaliser les acquisitions et d’améliorer les positions de négociation du ministère. À cet égard, un comité de pilotage du projet de contrat-cadre avait été constitué. Les travaux du groupe d’experts ont été présentés à ce comité de pilotage qui en a extrait des premiers éléments d’identification et de caractérisation des risques. Les travaux d’évaluation du retour sur investissement se heurtaient à ce stade à des difficultés dont le groupe d’experts a reconnu qu’elles pénalisaient l’analyse des différents scénarios. Les études se sont ensuite poursuivies notamment en termes d’évaluation des risques, de recherche de mesures tendant à réduire les risques envisageables, ainsi que d’analyse des opportunités. Le président du comité de pilotage a présenté les conclusions définitives de ces travaux quelques mois plus tard. Le bilan risques-opportunités final proposé était favorable à la conclusion du contrat sur la base d’un périmètre ajusté. Il convient d’observer que ce n’est pas le scénario déconseillé par le groupe d’experts qui a été retenu, mais celui qualifié de « risqué », pour lequel le groupe soulignait également que le retour sur investissement espéré, bien que non consolidé, pouvait sembler le meilleur.
Enfin, le ministère de la défense confirme que l’avis émis par la commission des marchés publics de l’État (CMPE) n’a remis en cause ni l’objet ni la procédure suivie pour passer l’accord cadre. La CMPE a, à cette occasion, formulé un certain nombre de recommandations qui ont été prises en compte lors de la signature des contrats considérés. Par ailleurs, bien que soulevant certaines interrogations, l’analyse faite par le rapporteur de la commission, préalablement à l’avis formel rendu par cet organisme, se concluait par des recommandations relatives aux modalités selon lesquelles la mise en place de l’accord-cadre pouvait être envisagée.