Entretien publié par La Dépêche du Midi, mercredi 14 février 2018, p. 4 (sur le même sujet, voir aussi ma tribune dans le Huffington Post) :
Comment expliquez-vous les hésitations du gouvernement sur le caractère obligatoire ou non du service universel ?
Il est évident que la ministre des Armées a été sensibilisée par les militaires sur les moyens colossaux que nécessiterait la mise en place d’un tel service universel. C’est pour cette raison qu’elle n’était pas favorable au caractère obligatoire. De son côté, Gérard Collomb déroule et applique le programme du candidat Macron.
Quel serait le coût de l’instauration ?
Il existe deux évaluations dont une réalisée notamment par Jean-Pierre Raffarin qui l’a chiffrée à 35 milliards d’euros ! Une autre estimation table sur un coût annuel compris entre 2,5 et 4,5 milliards d’euros. Nos finances publiques ne peuvent pas supporter un tel coût alors que nous ne parvenons même pas à financer le risque de la dépendance des personnes âgées et des Ehpad.
Le gouvernement doit-il revenir sur cette décision ?
Même si la difficulté ne fait pas peur à Emmanuel Macron, il doit pouvoir tenir des arbitrages courageux et renoncer à ce qui ressemble de plus en plus à une aberration. Il doit choisir la sagesse. Le président de la République s’honorerait à changer d’avis et à abandonner le projet.
Existe-t-il des alternatives au service universel ?
Nous avons de nombreux leviers à notre disposition. On peut imaginer muscler la journée défense et citoyenneté tout d’abord. Ensuite, il faut rendre obligatoire les cours sur l’esprit de défense qui ne sont tout simplement souvent pas dispensés par les enseignants. Nous pouvons aussi imaginer un renforcement et un développement de la réserve opérationnelle en direction des jeunes qui pourraient, par exemple, encadrer d’autres jeunes issus de milieux difficiles. Pourquoi ne pas s’appuyer également sur les cadets de la République qui s’adresse déjà aux 18-30 ans et qui est un préalable à une carrière dans la police ? Nous ne manquons pas de dispositif. Adaptons l’existant au lieu de dépenser des milliards dans un service universel qui reste à construire intégralement.
La durée d’un mois est-elle suffisante ?
En un mois, difficile de faire bouger les lignes. Par ailleurs, on ne sait pas comment accueillir ces centaines de milliers de jeunes. On parle d’organiser ce service universel l’été au sein de cités universitaires ou d’internats. L’organisation est démesurée.