Mar 12 2018

La réserve parlementaire « remplacée » ? Vraiment ?

En juin dernier, j’alertais le gouvernement quant aux menaces que faisait peser le projet de suppression de la réserve parlementaire sur de nombreux pans de la présence et du rayonnement français à l’étranger et appelais à la création d’un fonds pour la présence française à l’étranger. Dans une tribune publiée par Atlantico, je soulignais aussi la position délicate dans laquelle se trouvaient les parlementaires, privés de facto du droit d’amendement (cf le mien, jugé irrecevable) et réduits à tenter, en séance publique, d’obtenir des engagements moraux de la part du gouvernement. Début octobre, je déposais une proposition de loi tendant à créer un fonds pour la présence et le rayonnement français à l’étranger. En novembre, Jean-Baptiste Lemoyne m’assurait que le gouvernement allait mettre en place rapidement, « dans les toutes prochaines semaines », un fonds de dotation pour accompagner le tissu associatif jusqu’alors aidé via la réserve parlementaire. Début décembre, à l’occasion du débat sur la loi de finances 2018, j’abordais à nouveau le sujet auprès de Jean-Yves Le Drian, en séance publique et par un courrier. Puis, plus rien…

Le dossier vient de connaître deux « avancées » :

Premièrement, dans une réponse faite à ma question écrite de juin, le Ministre confirme le fléchage d’une partie des 25 M€ du programme « Jeunesse et vie associative » vers des subventions au tissu associatif français à l’étranger au titre du programme 151 « Français de l’étranger et affaires consulaires ». Cette réponse soulève le problème du périmètre couvert par le nouveau dispositif. Dans l’ancien système, une écrasante majorité des subventions en faveur des Français de l’étranger étaient attribuées via le programme 185 (« Diplomatie culturelle et d’influence »)  et non le programme 151 (« Français à l’étranger et affaires consulaires »). A titre d’exemple, les subventions aux Alliances françaises et aux établissements français à l’étranger relevaient du programme 185. La réponse à la question écrite ne permet pas de préciser quels types de projets seront désormais éligibles aux subventions : nous devrons être vigilants.

Deuxièmement, lors de son intervention devant l’Assemblée des Français de l’étranger (AFE), le Secrétaire d’Etat Jean-Baptiste Lemoyne a dévoilé le nom du nouveau dispositif – STAFE, pour Soutien au Tissu Associatif des Français de l’étranger – ainsi que quelques éléments complémentaires quant à sa mise en œuvre.
Il a notamment confirmé que ce ne seraient que 2 M€ qui seraient fléchés vers ce dispositif… ce qui représente une baisse de 40% par rapport aux 3,34 M€ de l’ancienne réserve des députés et sénateurs des Français de l’étranger.
Son discours étant resté relativement vague quant aux contours de la procédure, j’ai pu obtenir des précisions de la part de son cabinet :
1) d’ici peu devrait être diffusé par les ambassades et consulats un appel à projets auquel les porteurs de projets auraient deux mois pour répondre,
2) un premier examen des dossiers serait fait par les conseils consulaires, chargés de sélectionner les trois meilleurs
3) l’administration du Quai d’Orsay examinerait les dossiers retenus
4) une commission consultative se réunirait le 5 octobre 2018 (en amont de la session de l’AFE) pour valider la liste des subventions. Je ne peux que m’étonner et regretter que les parlementaires des Français de l’étranger soient écartés de cette commission (présidée par le ministre ou son représentant, et comprenant 3 membres de l’AFE, 2 représentants des associations des Français de l’étranger et 4 représentants de l’administration du Quai d’Orsay. Par ailleurs, je remarque le caractère simplement « consultatif » de cette commission : nul doute que le nouveau dispositif cherche à conforter la mainmise du ministère sur l’attribution des subventions en écartant au maximum les élus de la prise de décision.

Ces éléments me confortent dans la conviction qu’il est essentiel et urgent de créer une Fondation pour la Présence et le Rayonnement français à l’étranger qui soit en mesure d’abonder les maigres financements publics par des ressources privées et de soutenir les initiatives des Français de l’étranger dans toute la richesse de leur variété.