Avr 10 2018

Election des représentants au Parlement européen – discussion générale

Extrait du compte-rendu intégral du 10 avril 2018 :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, dans le contexte troublé que nous vivons aujourd’hui en Europe, notamment après le Brexit, nous avons un besoin impératif de renforcer l’adhésion de nos concitoyens aux valeurs européennes, de mieux leur en faire comprendre les enjeux, sans en cacher, bien sûr, les défaillances.

L’élection européenne est une occasion unique de débat, mais encore faut-il que nos compatriotes se sentent impliqués…

Le rétablissement de la circonscription nationale unique d’il y a quinze ans ne me semble pas la bonne réponse. Il affaiblirait la représentation des territoires dans leur diversité et renforcerait le poids des états-majors de partis politiques dans la sélection des candidats, au détriment des militants et des élus de terrain.

Je me concentrerai, ayant peu de temps, sur un sujet spécifique : celui de la représentation des 2,5 millions de Français de l’étranger, prioritairement concernés par les enjeux débattus au Parlement européen, mais qui n’y ont jamais obtenu de représentation directe.

En 1979, l’élection européenne avait été la toute première occasion pour eux d’exercer leur droit de vote dans un scrutin national. La représentation au Parlement européen est aujourd’hui la dernière frontière pour un exercice complet de la citoyenneté française à l’international, après que la révision constitutionnelle de 2008 a porté les Français de l’étranger à l’Assemblée nationale, après le Sénat.

Leur représentation au Parlement européen, pourtant, devrait aller de soi. Les Français de l’étranger, qu’ils vivent sur le territoire de l’Union européenne ou en dehors, sont les premiers témoins et les premiers artisans de la construction européenne. Le référendum dit de Maastricht avait suscité l’adhésion de plus 80 % d’entre eux. Leur expérience, leurs compétences seraient extrêmement utiles au débat européen et à notre pays.

C’est d’ailleurs une revendication ancienne, portée d’abord par le Conseil supérieur des Français de l’étranger, puis par l’Assemblée des Français de l’étranger. Dès 1997, Michel Barnier avait proposé la délimitation de vingt et une circonscriptions, dont l’une aurait représenté les Français de l’étranger. Pourtant en 2003, ces derniers avaient été privés du droit de vote à l’élection européenne.

En 2009, nous avions demandé que les deux sièges d’eurodéputés supplémentaires attribués à la France, à la suite de l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, reviennent aux représentants des Français de l’étranger. J’avais même déposé une proposition de loi en ce sens en 2014.

Il a finalement été décidé de rattacher arbitrairement les Français de l’étranger à la circonscription d’Île-de-France, sans leur donner de représentants spécifiques, et leur abstention a bien sûr été considérable.

Aujourd’hui, le retour à une circonscription unique sonne le glas de l’espoir d’une représentation spécifique des expatriés au Parlement européen – sauf acceptation miraculeuse de l’un de nos amendements. Je ne peux que le regretter !

Le vote du Parlement européen du 7 février dernier confirme que les esprits ne sont pas prêts pour des listes transnationales, pourtant voulues, dès l’origine, par les pères fondateurs de l’Europe.

Il faut bien sûr en tenir compte, mais soyons un peu ambitieux : pourquoi ne pas introduire progressivement une toute petite dose de représentation transnationale, en réservant quelques sièges à des députés élus par des expatriés européens ? Cela consoliderait le principe de citoyenneté européenne et la possibilité de vote dans l’État de résidence.

Auditionnée au lendemain de Maastricht, au nom d’une association de citoyens européens, par la commission des affaires institutionnelles du Parlement européen, j’avais déjà proposé cette circonscription spécifique transnationale à l’échelle européenne. L’idée avait été jugée enthousiasmante par la commission, qui trouvait que ce serait donner corps au principe de citoyenneté européenne, mais rien n’a avancé depuis !

Je rappelle que 13 millions d’Européens vivent dans un autre État que le leur, qu’ils sont très impliqués sur ces questions. Alors, bien sûr, le débat doit être conduit à l’échelle européenne, mais la France, qui a été pionnière de la représentation nationale de ses propres expatriés, s’honorerait, aujourd’hui, de promouvoir leur représentation à l’échelle européenne.