Il y a bien longtemps, passionnée en tant qu’étudiante par tout ce qui se passait à l’Est de l’Europe, je m’étais rendue en Roumanie, avec une bourse de notre ministère des Affaires étrangères, pour un mois d’études à l’université de Bucarest, en résidence à Brasov, ville dont l’altitude un peu plus élevée la rendait moins étouffante en été que les autres universités. Ce qui me valut un beau diplôme de roumain, mais la suspicion des services d’immigration américains. Nous étions en 1975, et je devais partir immédiatement après comme lectrice aux Etats-Unis. Malgré mon attestation sur l’honneur que je n’appartenais pas au Parti communiste ( !), mon visa se fit longtemps attendre, et il fallut l’intervention directe des plus hauts responsables de mon université américaine pour que je puisse finalement rejoindre mon poste…
Mon deuxième séjour à Bucarest, en février 2010, fut beaucoup plus court. Il était lié à la préparation de mon rapport sur la Convention franco-roumaine visant à instaurer une coopération entre nos deux pays pour la protection des mineurs isolés roumains sur le territoire français et leur retour dans leur pays d’origine ainsi qu’à la lutte contre les réseaux d’exploitation de ces mineurs. Outre mes réticences quant au remplacement du Juge aux enfants par le Parquet en matière de décision de renvoi (cf mon interview à l’UNICEF), réticences d’ailleurs reprises ensuite par le Conseil Constitutionnel, j’avais un certain nombre d’inquiétudes sur l’accueil réservé à ces adolescents dans leur pays et avais tenu à y rencontrer les autorités roumaines en matière d’immigration, du Ministère de la Justice.
Cette fois-ci, c’était pour participer à l’Assemblée parlementaire annuelle de l’OTAN que je retournais à Bucarest. Arrivée de Budapest où je participais à un colloque international sur la représentation des expatriés, j’eus le plaisir de retrouver mes collègues à l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, les députés Loïc Bouvard, Jean-Michel Boucheron, Nicole Ameline et Philippe Vittel et sénateurs Jacques Gautier et Xavier Pintat lors d’un dîner organisé par notre remarquable ambassadeur à Bucarest Henri Paul. Participaient à ce dîner le ministre de la défense roumain Gabriel Oprea et les présidents de commission de la défense du Parlement, tous excellents francophones, pétris de culture latine et française, tout comme le jeune Président du Sénat Mircea-Dan Geoana, ancien élève de l’ENA.
Une francophonie assez peu partagée hélas par la plus jeune génération, beaucoup plus tournée vers les valeurs matérielles de l’Ouest et la culture « hip and cheap » anglo-saxonne. Au point de me faire interroger dans les couloirs du Parlement par une journaliste de la télévision roumaine, non sur l’essence de nos travaux (alors même que je venais d’interroger le Secrétaire général de l’OTAN, Anders Forgh Rasmussen sur l’épineuse question de nos dépenses dans un contexte de désengagement de nombreux pays européens), mais sur le temps qu’en tant que parlementaire française, je pouvais passer à me « faire belle » le matin, et quelles couleurs je préférais pour m’habiller. Devant ma stupéfaction qu’une journaliste se déplace pour interroger une parlementaire sur de tels sujets, elle m’assura que c’était « çà qui intéresse nos auditeurs, pas les débats sur la défense» !..
Cette session de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN était aussi l’occasion de découvrir l’imposant siège du Parlement roumain où se tenaient nos réunions, dans ce fameux Palais construit à sa gloire par Ceaucescu et censé être encore aujourd’hui le plus grand parlement du monde. Elle aura été marquée par l’adoption de nombreux rapports et résolutions, portant sur des sujets aussi variés que la transition en Afghanistan, l’intervention en Libye, la défense anti-missiles, la cyber-défense ou encore la situation dans les Balkans occidentaux ou en Ukraine. Nous avons également entendu plusieurs communications de hauts responsables de l’OTAN ou d’experts et nous avons eu un débat très intéressant sur la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations unies, relative à la place des femmes dans les conflits armés. Au cours de la séance plénière, sont intervenus le Président de Roumanie, M. Traian Basescu, le Président du Sénat, M. Mircea Geoana, et de la chambre des députés, Mme Roberta Anastase, du Parlement roumain, ainsi que le Secrétaire général de l’OTAN, M. Anders Fogh Rasmussen.