L’Assemblée des Français de l’étranger s’est réunie en session plénière du 9 au 14 septembre. La sécurité des Français établis hors de France – et en particulier dans le monde arabe – a évidemment été au cœur des débats, de même que le nouveau système d’aides à la scolarité, ou les droits des retraités français à l’étranger (notamment l’accès à la carte vitale et le problème des certificats de vie).
Le gouvernement était très attendu sur la réforme de la représentation des Français de l’étranger, dont les décrets d’application sont « en cours de rédaction ». Dans la mesure où, durant le débat parlementaire, de nombreuses questions ont été écartées au motif qu’elles « relevaient du niveau réglementaire et non législatif », il aurait été plus que souhaitable que l’AFE soit consultée – si ce n’est associée – à la rédaction de ces décrets.
Si le sujet a longuement été débattu par la commission des lois de l’AFE, les réponses obtenues des membres de l’administration auditionnés ont été des plus floues et décevantes.
Le projet de décret relatif aux conseils consulaires et à l’AFE n’a pas été officiellement diffusé (au prétexte qu’il n’était pas finalisé) alors même que la version que s’est officieusement procuré la commission des lois était déjà largement rédigée. Lors de son audition, le directeur de cabinet d’Hélène Conway, Sylvain Itté, a d’ailleurs refusé de s’y référer, préférant diffuser un « powerpoint » parfaitement évasif. Drôle de manière de favoriser la consultation (pourtant promise) !
Sans rentrer dans les détails techniques (excellemment présentés dans le rapport de la commission) et sans revenir sur le débat parlementaire, je me contenterai de souligner les points suivants :
- En l’état, la rédaction du décret confirme le peu de compétences nouvelles dévolues aux élus de terrain : les « conseils consulaires » reprendront essentiellement les attributions des anciens comités (des bourses, des affaires sociales, etc.). Leur composition variera selon qu’ils se réuniront en « formation » bourses, affaires sociales, sécurité ou autre, mais les élus y seront généralement minoritaires face au chef de poste et à des « experts » – qui participaient déjà aux comités actuels – dont il est même prévu qu’ils bénéficient du droit de vote sur les questions relatives à l’éducation (notamment les bourses) ! Tout changer pour que rien ne change, donc… comme l’ont souligné plusieurs élus… de gauche !
- J’ai demandé que soit au moins mentionné dans le décret que les questions de citoyenneté (et notamment l’organisation de journées de la citoyenneté) concernaient aussi les conseils consulaires.
- Le conseil consulaire est convoqué par l’ambassadeur ou le chef de poste consulaire et les élus n’ont pas la possibilité de demander une réunion, de même que l’ordre du jour reste aux mains de l’administration.
- Les missions et prérogatives des conseillers consulaires en dehors des (rares) réunions du conseil consulaire sont entièrement passées sous silence, ce qui ne laisse pas présager de grandes innovations. D’autant que le projet de décret confirme également nos craintes que la multiplication des élus nuise grandement à leur capacité d’action, ceux-ci n’ayant plus aucun moyen pour se déplacer dans leur circonscription (ce qui n’est pas trop gênant lorsque celle-ci se limite à une métropole, mais l’est davantage lorsque l’on couvre 9 pays !).
- Le vice-président sera purement fantoche: il ne pourra pas présider le conseil consulaire en l’absence du chef de poste et n’aura pour seule « prérogative » que de représenter le conseil consulaire vis-à-vis de la communauté française (alors qu’il vaudrait mieux que l’ensemble des élus – de toutes façons peu nombreux – aient cette capacité).
- Le projet de décret confirme également que certains conseils consulaires auront compétence sur plusieurs circonscriptions consulaires… avec toutes les difficultés organisationnelles et les inégalités que cela implique !
- Enfin, un souci sur le plan juridique : l’exigence de parité pour les élections à l’AFE risque d’être difficile à tenir dans la mesure où le collège de candidats sera extrêmement réduits et non-paritaire… le risque de question prioritaire de constitutionnalité n’a d’ailleurs pas été nié par Sylvain Itté.
Détail amusant, Laurent Fabius ne semble pas partager l’enthousiasme (le déni ?) de sa Ministre déléguée : « À partir d’un diagnostic, je pense que beaucoup de gens disaient qu’il fallait bouger cela parce que il y avait des imperfections mais à partir de là, le choix qui a été fait c’est ce qu’on appelle la démocratie de proximité avec les conseillers consulaires… Je vois que c’est contesté … Je le constate, la démocratie c’est aussi cela. Il va y avoir l’année prochaine un système nouveau, je crois comprendre qu’il ne recueille pas un assentiment général. Cela me paraît tout de même excessif parce qu’il a dû être voté. Je comprends qu’il soulève encore pas mal de difficultés…. Je suis là aussi pour recueillir vos sentiments, là on le fait trop succinctement mais enfin j’ai l’oreille et donc j’entends bien qu’il y a encore des choses qui ne sont pas totalement satisfaisantes ».
Rendez-vous, donc, au printemps prochain (en principe le 25 mai, en même temps que les européennes), pour élire vos conseillers consulaires…