Le projet de loi de finances rectificative pour 2014 a été rejeté par le Sénat, malgré le soutien des écologistes. Une commission mixte paritaire sera donc réunie et travaillera sur la base du texte voté par l’Assemblée nationale – notamment avec les voix des députés socialistes « frondeurs » qui, après avoir vertement critiqué ce budget, l’ont finalement voté.
Outre les questions de la fiscalité des non-résidents (pour laquelle une procédure d’infraction a été ouverte par les institutions européennes à l’encontre de la France) et des bourses scolaires à l’étranger (adieu les belles promesses de François Hollande pendant sa campagne de « redéploiement » du budget de la « PEC » !), j’avais prévu d’intervenir sur les budgets de l’audiovisuel extérieur et de l’aide publique au développement.
Ces deux budgets sont en effet emblématiques des reniements du gouvernement et de sa propension à souffler le chaud et le froid. Ce budget propose en effet des économies de bouts de chandelle totalement inadaptés à la situation économique de notre pays… et n’hésite pas pour cela à revenir sur des engagements affirmés quelques semaines seulement auparavant :
- Le budget de l’aide publique au développement s’apprête à subir une nouvelle coupe sombre, de 61 millions d’euros… alors même que le gouvernement vient de réaffirmer, par la loi d’orientation sur le développement et la solidarité internationale qui vient d’être promulguée, l’objectif de consacrer 0,7% du revenu national à l’aide publique au développement. Il s’agit d’un engagement international de la France, et non d’un simple vœu pieux, sur lequel François Hollande s’était formellement en 2012. Chaque année qui passe voit le budget de l’APD s’écarter davantage de cette cible. En 2013, la France n’a consacré que 0,41% de son Revenu National Brut à la solidarité internationale, alors qu’elle y consacrait encore 0,45% en 2012. Incriminer la crise économique est fallacieux : malgré la crise, la Norvège, le Danemark ou le Luxembourg continuent d’atteindre leur engagement de dépenser au moins 0,7 % de leur revenu national à l’aide au développement. Le Royaume-Uni a, quant à lui, malgré la crise, rempli cet engagement pour la toute première fois en 2013.
- L’audiovisuel extérieur va, quant à lui, voir ses crédits amputés de 621 000 €, ce qui représente près de 40% de l’augmentation de la dotation publique prévue dans le Contrat d’Objectifs et de Moyens 2013-2015, signé entre France Médias Monde et l’Etat… il y a seulement 3 mois ! Il y a là un véritable enjeu de cohérence de l’action publique et de crédibilité de la parole politique. A quoi bon conclure un Contrat d’Objectifs et de Moyens – réclamé depuis plusieurs années – pour en annuler de facto le contenu en réduisant drastiquement les moyens alloués ? Depuis 2011, des efforts considérables ont été réalisés par notre audiovisuel extérieur, les ressources publiques ayant diminué de 5,1% en 3 ans. France Médias Monde opère dans un contexte de concurrence internationale féroce ; quelle entreprise pourrait conquérir des parts de marché dans un contexte d’aussi grande imprévisibilité budgétaire ? Dans le privé, accepterait-on qu’un dirigeant fixe des objectifs et des moyens pour revenir sur ces décisions moins de trois mois après ? Alors que la bataille du soft power s’intensifie, priver France Médias Monde de ses moyens d’action serait une véritable erreur géopolitique et culturelle.
Les exemples de contradictions entre le discours et les règles budgétaires abondent dans ce projet de budget, mais nous ne devons pas nous en étonner car il en a toujours été ainsi depuis 2012. Le gouvernement parviendra-t-il un jour à assumer son positionnement et à cesser de louvoyer ?