C’est avec surprise et consternation que j’ai appris l’évasion rocambolesque de Saint-Domingue de deux des quatre Français impliqués dans l’affaire « Air Cocaïne ». Si je comprends parfaitement leur détresse face au verdict de la justice dominicaine, j’estime qu’ils ont été mal conseillés et crains les conséquences de leur geste pour les deux accusés français encore sur place et pour nos relations diplomatiques.
En 2013, j’avais pourtant été la première parlementaire française à m’engager en faveur des quatre Français alors détenus en République dominicaine dont le traitement par la justice locale et l’insuffisance du soutien de la part de l’administration consulaire française m’avaient alertée. Reports répétés des audiences, changements de juges,… nombre d’éléments jetaient le trouble sur l’impartialité de leur procès. Pour les soutenir, j’avais été jusqu’à leur rendre visite dans leur prison reculée de Higüey, dans l’est du pays. J’avais également plaidé leur cause auprès de Laurent Fabius, estimant que, de manière générale, la France, au titre de la protection consulaire, devrait s’impliquer davantage en faveur de ses détenus incarcérés à l’étranger.
M’étant il y a quelques années fortement engagée sur le dossier Florence Cassez, j’avais retenu les dangers d’une médiatisation de ce type de dossier, tant pour les prévenus (qui risquent d’être victimes du réflexe nationaliste d’une opinion publique et d’une justice se sentant mises au ban des accusés par l’étranger) que pour les relations bilatérales (au Mexique, les conséquences commerciales et diplomatiques avaient été dramatiques). J’espérais éviter de telles dérives par des interventions diplomatiques discrètes.
Les deux pilotes, suivant apparemment les conseils de responsables du Front National, ont opté pour une stratégie toute différente. Celle de l’égoïsme, alors même que leur honneur d’anciens militaires aurait voulu qu’ils n’abandonnent pas dans leur fuite les deux autres Français, dont le sort judiciaire ne pouvait qu’être impacté par leur fuite. Celle de l’irresponsabilité, puisque après avoir obtenu avec difficulté et grâce à l’intervention de la France une mise en liberté surveillée, ils ont utilisé celle-ci pour s’enfuir, créant un précédent qui ne pourra que nuire aux autres demandes de mise en liberté surveillée qui pourraient être présentées par d’autres détenus français dans le monde.
Cet épisode jette en tout cas une lumière crue sur les méthodes et principes du FN, qui ne s’embarrasse nullement de la légalité ou des relations diplomatiques et privilégie la loi du plus fort à l’intérêt général.
Je continue bien sûr à me mobiliser en faveur des deux Français toujours retenus à Saint-Domingue, Nicolas Pisapia et Alain Castany qui ont plus que jamais besoin de l’aide de la France.